Maurice Ohana passe l’essentiel de son enfance au Maroc. Entre 1927 et 1929, sa famille s’installe temporairement Ă  Biarritz oĂą il travaille le piano avec Jehanne Pâris. Après l’obtention de son baccalaurĂ©at, en 1932, il dĂ©bute des Ă©tudes d’architecture (qu’il abandonnera quelques annĂ©es plus tard) Ă  Paris tout en Ă©tudiant le piano avec Lazare LĂ©vy puis avec Frank Marshall Ă  Barcelone. Il donne plusieurs rĂ©citals, rencontre « La Argentinita Â», cĂ©lèbre danseuse, et son guitariste RamĂłn Montoya, effectue une tournĂ©e avec la cantatrice Lotte Schöne, travaille le contrepoint avec Daniel-Lesur et compose ses premières Ĺ“uvres (dĂ©truites ou retirĂ©es du catalogue). En 1939, il se marie avec sa première Ă©pouse et s’engage, un an plus tard, dans l’armĂ©e britannique avec laquelle il est amenĂ© Ă  voyager en Europe et en Afrique. En 1944, il est mobilisĂ© en Italie, d’abord Ă  Naples oĂą il rencontre AndrĂ© Gide avec qui il se liera d’amitiĂ©, puis Ă  Rome, oĂą il entre Ă  l’AcadĂ©mie Santa Cecilia dans la classe de piano d’Alfredo Casella. C’est Ă  cette Ă©poque qu’il compose le Caprice n°1 pour piano.

DĂ©mobilisĂ© en 1946, Ohana revient habiter Ă  Paris et fonde, un an plus tard avec Alain Bermat et Pierre de La Forest Divonne, le groupe Zodiaque qui dĂ©fend la libertĂ© de langage contre toutes les « tyrannies artistiques Â». C’est dans cet esprit d’indĂ©pendance qu’est crĂ©Ă©e, en 1950, une de ses Ĺ“uvres majeures, le Llanto por Ignacio Sánchez MejĂ­as, influencĂ© Ă  la fois par Manuel de Falla et le « cante jondo Â» espagnol. Il met de cĂ´tĂ© sa carrière de concertiste pour se consacrer exclusivement Ă  la composition. Il s’initie Ă  la musique concrète auprès de Pierre Schaeffer et rĂ©alise de nombreuses pièces radiophoniques Ă  travers lesquelles il poursuit l’élaboration de son langage personnel, marquĂ© Ă  la fois par un refus de tout intellectualisme et une fidĂ©litĂ© Ă  la tradition espagnole et aux rythmes africains, qui s’exprime notamment dans les Cantigas (1953-54), et les Etudes chorĂ©graphiques pour percussion (1955).

Poursuivant son exploration de l’univers sonore, il mène des recherches sur les micro-intervalles qu’il utilise notamment dans le Tombeau de Claude Debussy (1962), œuvre qui marque un tournant dans son parcours, selon ses propres dires. Il reçoit le grand prix de l’Académie Charles Cros pour les enregistrements de Syllabaire pour Phèdre et Signes, puis, plus tard, de Cantigas et Cris. Les années 1970 constituent une nouvelle étape dans son activité créatrice avec la composition d’œuvres majeures comme les Vingt-quatre Préludes pour pianocréés par le pianiste Jean-Claude Pennetier en 1973, l’Anneau du Tamarit pour violoncelle et orchestre (1976), les Lys de Madrigaux pour voix de femmes et ensemble instrumental, la Messe, créée au festival d’Avignon en 1977, qui cherche à renouer avec la liturgie des premiers temps chrétiens, le Livre des Prodiges (1978), une de ses rares partitions pour grand orchestre ou les Trois Contes de l’Honorable Fleur (1978) dont le livret a été rédigé avec le concours de la seconde épouse du compositeur, la philosophe Odile Marcel.

Il continue Ă  explorer l’écriture pianistique au dĂ©but des annĂ©es 1980, notamment Ă  travers des Ĺ“uvres comme le Concerto pour piano et orchestre (1980) dĂ©diĂ© Ă  Jean-Claude Pennetier et les six premières Etudes d’interprĂ©tation (1981-82). Il se consacre alors essentiellement Ă  son opĂ©ra La CĂ©lestine (1982-87) qui est crĂ©Ă© Ă  l’opĂ©ra de Paris en 1988. A quelques exceptions près comme le Concerto pour violoncelle et orchestre « In dark and blue » (1988-90), son Troisième Quatuor Ă  cordes « Sorgin-NgĂ´ Â» (1989) ou Anonyme XXe siècle (1988) pour deux guitares, ses dernières Ĺ“uvres sont essentiellement vocales.

Fidèle Ă  ses origines andalouses, tout en Ă©largissant leur essence musicale Ă  des dimensions universelles et en recourant Ă  des modes d’expressions rĂ©solument contemporains, Maurice Ohana a progressĂ© vers une synthèse tout Ă  fait personnelle. Epris de libertĂ©, il se dĂ©finissait comme un « moderne archaĂŻque Â». Ce grand superstitieux, qui disait d’ailleurs ĂŞtre nĂ© en 1914 - et non en 1913 -, est dĂ©cĂ©dĂ© Ă  Paris, ironie du sort, un vendredi 13 au mois de novembre 1992, laissant derrière lui une Ĺ“uvre riche et profondĂ©ment originale.

Principales distinctions

  • 1961 : Prix Italia pour Histoire vĂ©ridique de Jacotin qui Ă©pousa la sirène des ocĂ©ans ;
  • 1975 : Grand prix national de la musique ;
  • 1978 : Prix Florence Gould de l’AcadĂ©mie des beaux-arts ;
  • 1982 : Commandeur dans l’ordre des Arts et Lettres, prix Arthur Honegger ;
  • 1983 : Prix musical de la Ville de Paris ;
  • 1985 : Prix Maurice Ravel ;
  • 1990 : Chevalier de la LĂ©gion d’honneur ;
  • 1992 : Prix SACEM de la meilleure composition contemporaine pour le Concerto pour violoncelle « in dark and blue Â».
© Ircam-Centre Pompidou, 2014

sources

François Porcile, Édith Canat de Chizy, Maurice Ohana, Fayard, 2005 ; site de l’association Les amis de Maurice Ohana (voir ressources).



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