Fille de parents pratiquant les arts visuels, Pascale Criton commence ses études musicales avec la clarinette et la guitare. Compositrice dont les intérêts variés incluent le free jazz et l’ethnomusicologie, elle étudie la composition avec Ivan Wyschnegradsky, Gérard Grisey et Jean-Etienne Marie, l’acoustique au LAM (Laboratoire d’acoustique musicale), et participe aux activités du Groupe de Recherche sur la Tradition Orale avec Claude Laloum (Abidjan, Côte d’Ivoire, 1979).

Parmi les rencontres formatrices des années 1970 compte celle avec le compositeur microtonal et émigré russe Ivan Wyschnegradsky, qui initie Pascale Criton à ses concepts de « pansonorité » et de « continuum sonore ». Ses études avec Gérard Grisey, à partir de 1976, l’amènent au contact de l’esthétique de l’école spectrale et des quatuors de Giacinto Scelsi. Son intérêt pour Wyschnegradsky donne lieu à un échange régulier avec Gilles Deleuze, qui trouve des échos étonnants entre les concepts développés par lui — « chaos », « planomène », « plan d’immanence » — et ceux de « pansonorité » et de « continuum » de Wyschnegradsky¹.

Ses études des idées de Deleuze et Wyschnegradsky l’amènent à un cursus universitaire de recherches musicologiques : une maîtrise avec Daniel Charles à l’Université Paris VIII (1987), un DEA sous la direction de Hugues Dufourt, une formation doctorale à l’Ircam (1993) et un doctorat d’Etat sous la direction de François Decarsin. Ses recherches font l’objet d’articles et de conférences concernant l’esthétique musicale².

De 1975 à 1980, Pascale Criton est membre de la Compagnie de Théatre musical des Ulis, avec Michel Puig, Michaël Lonsdale, Catherine Dasté et Edith Scob. Elle dirige des ateliers créatifs : à l’Université Paris XIII (1979-1981), au Festival d’Avignon (1977-1978), au Conservatoire de Pantin (1981-1982). Son expérience de la scène se poursuit avec des composition pour Productions Transcénic, notamment la pièce Ecrans Noirs, créée pour « Écritures scéniques » au Centre Georges-Pompidou en 1982. Elle participe aux cours d’été de Darmstadt en 1980 et 1988, et se forme à l’électroacoustique au CIRM (Centre international de recherche musical, fondé en 1968 par Jean-Étienne Marie, 1980-1982). Sa première pièce microtonale, Mémoires (1982), est écrite pour piano en 16^e de ton, dispositif conçu par le compositeur mexicain Julián Carrillo. Sa formation en informatique musicale à l’Ircam (1986) mène à la composition de Thymes (1987–88) pour piano microtonal piano et sons de synthèse.

Depuis 1980, Pascale Criton se consacre essentiellement à l’écriture instrumentale, introduisant des instruments spécifiquement accordés (piano, guitares microtonales, cordes… en 1/4, 1/8^e, 1/12^e, 1/16^e de ton). En tant que compositrice rattachée au CIRM (1982-89), elle reçoit de nombreuses commandes pour son travail sur les micro-intervalles et collabore plus tard avec le Laboratoire d’Acoustique de l’Ircam (1991-92). Elle fonde l’Association Jean-Etienne Marie (1990) et le groupe de recherche Sysmis (1993). Compositrice consultante à l’Ircam au Département de la Recherche Musicale (1989-1991), elle collabore aussi depuis 1993 avec le Laboratoire Ondes et Acoustique (École Supérieure de Physique Chimie Industrielle, Paris). Elle a également enseigné dans les Écoles Nationales de Musique du Blanc-Mesnil (1978-1995) et de Saint Denis (1993-1995).

La musique de Pascale Criton a fait l’objet de commandes d’État, de villes et d’ensembles. Elle a été créée et jouée en France et à l’étranger : au Centre Georges-Pompidou, à l’Ircam, au MANCA, au MIDEM, à Intermusica, Ars Electronica, Darmstadt, l’Institut Ijsbreker, le Festival Archipel, Huddersfield Spring, IIIe Pianoforum (Heilbronn), l’American Festival of Microtonal Music (New York), Radio-France et bien d’autres. Parmi les commandes importantes d’œuvres se trouvent Territoires imperceptibles (Ensemble 2e2m, 1997), Artefact (commande de l’État, Ensemble 2e2m, 2001), Objectiles (Radio France, 2002), Plis pour ensemble instrumental et captations (commande de l’État, 2007-2009), Wander Steps (Festival Messiaen au Pays de la Meije, 2018), Circa (GMEA, 2019) et Alter pour voix et orchestre (BBC Scottish Symphony Orchestra & BBC Radio 3, 2022). Parmi les enregistrements de sa musique on compte deux CD monographiques, Pascale Criton (2003, Ensemble 2e2m, Assaï 222 482) et Infra (2017, Potlatch P317).

<sup>1. Paul BAZIN, La pansonorité d’Ivan Wyschnegradsky et son héritage, Thèse de doctorat, Université McGill, 2020, p. 199 : https://escholarship.mcgill.ca/concern/theses/8910jz928↩
2. Voir la page « Ressources » pour une liste complète des écrits de la compositrice.↩</sup>