David Tudor est certainement l’un des pianistes les plus importants du XXe siècle, Ă  la fois par son rĂ´le d’interprète de musique nouvelle, mais aussi â€“ de façon plus subtile â€“ d’ambassadeur de l’école pianistique de New York en Europe. Il apprend l’orgue avec William Hawke et le piano avec Josef Martin et Irma Wolpe Rademacher, puis Ă©tudie la composition auprès de Stefan Wolpe. Il rencontre John Cage en 1948 avec qui il collaborera jusqu’à la mort de ce dernier en 1992.

Tudor interprète pour la première fois aux États-Unis la Deuxième Sonate pour piano de Pierre Boulez au Carnegie Hall en 1950, puis va collaborer ou ĂŞtre dĂ©dicataire d’innombrables Ĺ“uvres composĂ©es par les figures majeures de l’avant-garde : Sylvano Bussotti (Five Piano Pieces for David Tudor, 1959), Karlheinz Stockhausen (KlavierstĂĽcke V Ă  VIII), Mauricio Kagel (Improvisation ajoutĂ©e pour orgue, 1961-1968), Franco Evangelisti (Proiezioni Sonore), John Cage (Music of Changes, 1951, 4’33’’, 1952) mais aussi Earle Brown, Conlon Nancarrow, Christian Wolff, Stefan Wolpe, La Monte Young, Bo Nilsson, Henri Pousseur, etc.

Invité par le musicologue Wolfgang Steinecke aux cours d’été de Darmstadt en 1956, soit deux ans avant le passage retentissant de Cage en Europe, Tudor aide à promouvoir la musique expérimentale américaine. Il joue Variations I en 1958, lors de la conférence mythique du compositeur américain et participe à des cours d’interprétations avec Boulez et Nono. Même s’il ne viendra que quatre fois aux cours d’été de Darmstadt (1956, 1958, 1959 et 1961) sa présence sera fondamentale pour la jeune génération.

Au cours des annĂ©es soixante, il se retire progressivement de la scène en tant que pianiste pour aborder une nouvelle facette de son expression artistique : la composition. Il devient alors l’un des prĂ©curseurs de la live electronic music, musique basĂ©e sur de l’improvisation directe, visant Ă  rĂ©intĂ©grer le hasard et l’humain dans le processus crĂ©atif, s’opposant ainsi Ă  la musique Ă©lectronique traditionnellement composĂ©e en studio. Il Ă©labore ses propres circuits Ă©lectroniques et joue lui-mĂŞme ses compositions (Bandoneon! 1966). Puis, pour la Merce Cunningham Dance Company (MCDC), avec laquelle il collabore dès sa crĂ©ation en 1953 (il en deviendra le directeur musical en 1992), s’ensuit toute une sĂ©rie de pièces comme Rainforest (1968), Toneburst (1975), Forest speech (1976), Weatherings (1978), Phonemes (1981), Sextett for Seven (1982), Fragments (1984), Webwork (1987), Five Stone Wind (1988), Virtual Focus (1990) …

En 1970, l’organisation Experiments in Art and Technology (EAT) est nommĂ©e pour rĂ©aliser les activitĂ©s du Pavillon Pepsi-Cola lors de l’exposition universelle Ă  Osaka. La musique de ce projet, dont l’idĂ©e initiale Ă©tait de concevoir une Ĺ“uvre d’art totale dans laquelle le visiteur vivrait une expĂ©rience multisensorielle, est crĂ©Ă©e par Tudor, Robert Whitman et Gordon Mumma. Anima Pepsi est une bande faite d’un mĂ©lange de sons musicaux et de sons d’insectes â€“ qui rĂ©apparaĂ®tront dans des compositions ultĂ©rieures.

En 1989, Tudor est approché par des ingénieurs d’Intel pour créer le Neural Network Synthesizer, un synthétiseur analogique constitué d’une puce neuronale, pour lequel il composera plusieurs pièces, dont Neural Synthesis (solo) et Neural Network Plus (1992). Enfin, le dernier projet de Tudor, Toneburst: Maps and Fragments 1995–1996 est une collaboration musicale/visuelle avec l’artiste Sophia Ogielska prenant comme point de départ les diagrammes de la pièce Untitled (1972), combinée avec des peintures translucides et autres éléments visuels propres au langage d’Olgieska.

Au-delà de sa carrière de pianiste et de compositeur, Tudor à également enseigné à l’université de l’État de New York à Buffalo (1965-1966), à l’université de Californie à Davis (1967), au Mills College d’Oakland (1967-1968), au National Institute of Design d’Ahmedabad, en Inde (1969).

© Ircam-Centre Pompidou, 2024

sources

Site dédié au compositeur : https://davidtudor.org/
Amy C. Beal, « David Tudor in Darmstadt », Contemporary Music Review, Vol. 26, No. 1, February 2007, p. 77–88.
Martin Iddon, John Cage and David Tudor: Correspondence on Interpretation and Performance, Cambridge University Press, 2013.



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