Formé à la musique auprès de Nadia Boulanger et Charles Koechlin, Francis Dhomont commence par composer de la musique instrumentale. Mais dès 1947, avant les débuts de la musique concrète telle que théorisée par Pierre Schaeffer, il expérimente avec l’un des premiers modèles de magnétophone Webster à fil. Il commence alors à enregistrer ce qui ne s’appelle pas encore des objets sonores et à composer avec.
Il s’installe aux Baux-de-Provence où il travaille le bois pour gagner sa vie et élever ses enfants. Il compose sur son temps libre dans un studio qu’il se crée à Avignon. Éloigné du milieu musical parisien, il commence à produire sa musique en circuit fermé et ne compose plus que des pièces acousmatiques. Suite à la découverte des œuvres du Groupe de Recherche Musicale, il y effectue un stage en 1973-1974 et programme leurs créations au festival Musiques multiples de Saint-Rémy-de-Provence qu’il a fondé et dont il est président de 1975 à 1979. C’est à l’occasion d’un de ces festivals qu’il rencontre la soprano Marthe Forget, avec qui il entreprend cette année-là un voyage au Canada à l’occasion duquel le compositeur choisit de s’établir au Québec. Il y effectue une résidence d’un an à la Faculté de Musique de l’Université de Montréal et reste vingt-six ans sur le sol canadien, pendant lesquels il écrit, compose et enseigne — notamment à l’Université de Montréal de 1980 à 1996. Il réside depuis 2004 en Avignon.
Le catalogue de Francis Dhomont, strictement consacré — outre quelques années à ses débuts — à la musique acousmatique témoigne de son intérêt pour cette forme qui constitue une absence totale de spectacle visuel. Affecté dans sa jeunesse de problèmes aux yeux, le compositeur est contraint de rester dans le noir pour se soigner. Ces conditions mêlées à la période de son apprentissage de la musique fait de celle-ci pour lui un événement strictement sonore.
C’est notamment la raison du thème récurrent de l’obscurité et de la nuit dans son catalogue, comme avec Figures de la nuit (1991), Studio de nuit (1992), Nocturne à Combray (1996) ou Forêt profonde (1996). Cette dernière œuvre, inspirée de La psychanalyse des contes de fées de Bruno Bettelheim, témoigne également de sa sensibilité à la psychanalyse en tant que sujet de composition. Il lit et travaille sur les travaux de Ronald Laing, notamment sur Knots, un recueil de textes poétiques sur les confusions de l’esprit et les difficultés de rapports relationnels et tire plus tard de son livre Le moi divisé la pièce Sous le regard d’un soleil noir (1979-1981) qui traite de la schizophrénie. Cette œuvre constitue un bon exemple de la conception de Francis Dhomont de la musique électroacoustique comme permettant des « compositions sonores proches de l’opéra par leur dramaturgie mais d’un opéra sans chanteurs, sans instruments et complètement affranchi des conventions de l’art lyrique1 ». Souvent à la frontière du texte, même en l’absence de paroles, ses œuvres sont figuratives et cherchent à développer une idée, en témoignent les différents titres de ses cycles : le Cycle de l’errance, le Cycle du son, le Cycle des profondeurs…
Francis Dhomont est très actif au sein des institutions de la musique contemporaine : membre fondateur de la Communauté électroacoustique canadienne en 1986, il est aussi président du collectif Les Acousmonautes (Marseille) et « Ehrenpatron » de l’organisme Klang Projekte Weimar. En 2014, il devient Membre honoraire de la Confédération internationale de musique électroacoustique (CIME). Il a également assuré la direction de numéros des revues Musiques & Recherches et Circuit et réalisé plusieurs émissions pour Radio-Canada (Voyage au bout de l’inouï) et Radio France (L’Acousmathèque).
Prix et distinctions
- Président d’honneur du Festival Klang! (Montpellier), 2017 ;
- Grand prix Giga-Hertz-Preis, 2013Â ;
- Qwartz Pierre-Schaeffer, 2012Â ;
- Baiocco d’oro, 2012 ;
- Doctorat honoris causa de l’Université de Montréal, 2007 ;
- Prix de la meilleure création contemporaine électroacoustique de la Sacem, 2007 ;
- Prix Victor-Martyn-Lynch-Staunton du Conseil des arts du Canada, 1997Â ;
- Prix Ars Electronica “Auszeichnungen” pour Chiaroscuro, 1992 ;
- 1er Prix de la Tape Music Competition de Brock University (Canada) pour Points de fuite, 1985Â ;
- Prix du Concours International de Bourges, 1976, 1979, 1981, 1984, 1988.
- In : Daniel TERUGGI (dir.), « Francis Dhomont », Portraits polychromes, Paris, INA-GRM, 2006, p. 14.