Chiyoko Szlavnics est diplômée de la faculté de musique de l’Université de Toronto en 1989. De 1994 à 1997, dans cette même ville, elle prend des cours particuliers avec le compositeur James Tenney, puis en 1998 elle part s’installer à Berlin, où elle vit depuis.
Chiyoko Szlavnics compose pour une grande variété d’instruments et d’ensembles, qu’elle combine souvent avec des ondes sinusoïdales. Héritière de James Tenney et d’Ivan Wyschnegradsky, Szlavnics explore le phénomène audible appelé « battement », mis en évidence par l’utilisation particulière qu’elle fait de longues notes tenues, de glissandi, d’effets de densification du matériau sonore, de silences parfois prolongés, de la micro-tonalité, ainsi que de l’intonation juste, et sa manière de combiner les instruments acoustiques avec l’électronique.
Szlavnics utilise une approche graphique pour développer ses pièces expérimentales. À partir de 2003 les dessins deviennent le point de départ de son processus compositionnel. Elle pratique ainsi la composition musicale et le dessin dans un même élan créateur, dans une recherche de correspondance entre l’acoustique et le visuel, chaque discipline influençant mutuellement l’autre.
Grâce à sa mère passionnée d’art, elle entre très tôt en contact avec la musique, mais aussi la littérature, la danse et les arts plastiques, et perçoit leurs analogies et correspondances en se représentant la musique comme des lignes et des formes en mouvement. Devenue compositrice, elle commence à dessiner ce qui, avoue-t-elle, « a été la libération de ma tendance à composer de la musique qui sonnait comme de la musique que je connaissais déjà  ».1 Elle déclare également  : « Ma musique exige que l’auditeur s’avance, s’approche pour voir (entendre) les détails - comme on le ferait pour regarder les détails du pigment d’une peinture. »2
Par ailleurs, si sa musique fait l’objet de nombreuses représentations publiques, les structurations visuelles de ses œuvres musicales font à leur tour l’objet d’expositions en Europe et en Amérique du Nord.
Pour le conservateur et historien de l’art Eugene Blume, « les dessins indépendants de Szlavnics ne contiennent aucune indication qui pourrait influencer la façon dont nous les regardons. Voir est toujours une performance silencieuse basée principalement sur les sensations. Malgré cela, écouter la musique de Szlavnics revient à écouter les sons des lignes de ses dessins. L’artiste n’a pas nécessairement l’intention de faire de ces dessins des compositions ou des notations pouvant être traduites en sons. Pourtant, même si elle considère ses œuvres sur papier comme des dessins à part entière, elles sont tout de même musicales. L’artiste conceptuelle Hanne Darboven, ayant trouvé dans ses multiples notations un moyen d’exprimer l’être dans le temps, a commencé à mettre en musique ses vastes tableaux de personnages et de symboles. À cet égard, il semble y avoir une certaine affinité entre les deux artistes. »3
Pour un temps co-directrice de l’Ensemble Zwischentöne aux côtés de Peter Ablinger, Chiyoko Szlavnics compose pour des ensembles tels que l’Ensemble Contrechamps, le Quatuor Bozzini, Ostravská Banda ou Klangforum Wien, mais aussi pour des musiciens solistes (Julia Eckhardt, entre autres).
Sa musique est jouée lors de nombreux festivals tels que MaerzMusik, Ostrava New Music Days, New Music Concerts, ou encore Darmstadt, mais la forme de concerts qu’elle préfère sont ceux ayant lieu dans un cadre intime, en dehors des sentiers battus tels Haus 19 à Berlin, les Wandelweiser Concerts à Haan, le Q-O2 à Bruxelles, ou l’Abbatiale de Bellelay.
1. [Carolin Naujocks, “Komponistin Chiyoko Szlavnics: Linien im harmonischen Raum,” Deutschlandfunk Kultur, 17 June 2021, https://www.deutschlandfunkkultur.de/komponistin-chiyoko-szlavnics-linien-im-harmonischen-raum-100.html (accessed 18 October 2022).]↩
2. [Jennie Gottschalk, “Postlude to Chapter Three,” in Being Time: Case Studies in Musical Temporality. By Richard Glover, Jennie Gottschalk, and Bryn Harrison. New York: Bloomsbury Academic, 2019.]↩
3. [CD #0022 Chiyoko Szlavnics: Gradients of Detail, https://www.world-edition.com/we0022-e (accessed 17 October 2022).]↩