Originaire de Sicile, Salvatore Sciarrino étudie les arts visuels avant de se consacrer à la musique. Il se forme essentiellement en autodidacte, par l’étude des œuvres des compositeurs anciens et modernes, mais reçoit aussi les conseils de Antonio Titone et Turi Belfiore. La première création publique d’une de ses œuvres a lieu en 1962. Il complète ses études à Rome et à Milan et s’initie à la musique électronique avec Franco Evangelisti, qu’il considère avec Stockhausen comme l’un de ses « pères » artistiques.
Il enseigne ensuite la composition aux conservatoires de Milan, Pérouse et Florence, et dirige des masterclasses. De 1978 à 1980, il est directeur artistique du théâtre communal de Bologne. En 1982, il se retire dans la petite ville d’Ombrie Città di Castello pour se consacrer à la composition et à son enseignement jusqu’en 2000. En 2014-2015, il donne une série de masterclasses au conservatoire de musique de Latina, au sud de Rome.
Bien qu’affirmant sa filiation avec des figures de l’avant-garde musicales, Stockhausen en particulier, Salvatore Sciarrino revendique pour son travail une forte continuité avec l’histoire. Son abondant catalogue ne présente pas de ruptures nettes mais une évolution vers une conception de la musique parfois désignée comme « écologie » de l’écoute et du son. On a parlé dès ses débuts, dans les années soixante, d’un « son Sciarrino ».
Sa musique est intimiste, concentrée et raffinée, construite sur des principes de microvariations de structures sonores constituées de timbres recherchés et de souffles. Il élabore un monde sonore transparent, raréfié et proche du silence (ou du « son zéro » qui, pour le compositeur, est déjà musique), un monde fait d’une multitude de sons microscopiques, d’un flot continu de bruits infimes, un monde sonore réduit à l’essentiel. Les titres de ses œuvres sont éloquents à cet égard : Esplorazione del bianco (1986), Cantare con silenzio (1999).
Le compositeur organise ses œuvres comme on trace les lignes d’un dessin, utilise des techniques d’estompage du son, de fusion des couleurs, de jeux de lumière dans le modelage du timbre : un univers proche des arts plastiques dont Morte di Borromini (1988), Omaggio a Burri (1995) font l’éloge.
Dans le catalogue de Sciarrino, la voix occupe une place majeure, des expériences sur l’émission vocale de Lohengrin, à une pièce pour flûte et orchestre où elle est seulement évoquée et représentée par des instruments, le Libro notturno delle voci (2009) et dans des œuvres dont l’écriture est centrée sur une continuité mélodique liée à la psychologie des personnages : Luci mie traditrici (1998), Macbeth (2002), et surtout Infinito nero (1998), sur les visions mystiques de Maria Maddalena dei Pazzi.
Le travail sur l’unité de la poésie et la musique reste un « chantier » majeur du compositeur comme l’évoque le titre même de Cantiere del poema (2011) sur des textes de Pétrarque et Foscolo. Il peut, en outre, mettre en valeur avec humour une poétique de la vie ordinaire, avec l’usage, par exemple, des annonces de gares dans Senza sale d’aspetto (2011), qui ornaient déjà le livret (écrit par le compositeur) de l’opéra en un acte Superflumina (2010).
Il a reçu de nombreux prix, dont le prix de la Société internationale de musique contemporaine en 1971 et 1974, le prix Dallapiccola (1974), celui de l’Anno discografico (1979), le Psacaropoulos (1983), le prix Abbiati (1983), le Premio Italia (1984), le prix Prince Pierre de Monaco (2003), le prix international Feltrinelli (2003), le prix de l’état de Salzburg (2006), le Premio Frontiere della Conoscenza per la musica (2011) de la Fondation BBVA, le Premio Una vita per la musica (2014) Teatro La Fenice - Associazione Rubenstein di Venezia et le Lion d’or de la Biennale de musique de Venise pour l’ensemble de sa carrière en 2016.