Parcours de l' oeuvre de Fausto Romitelli

par Pierre Rigaudière

« L’écriture est le lieu où se vérifie l’écart par rapport à ce que nous recueillons. C’est le travail sur l’écriture qui transforme notre propre langage, fait advenir notre expression1. » En formulant ainsi son rapport à l’écriture, Fausto Romitelli soulignait, quelques années avant sa disparition prématurée, l’axe central qui avait guidé une démarche singulière. Il se définissait ce faisant comme un compositeur de l’intégration, ouvert aux apports des musiques non écrites, attaché cependant à l’écriture comme régulateur, filtre, moyen de distanciation et surtout condition d’une tension susceptible de féconder l’expression. S’il s’agissait pour lui « d’intégrer dans l’écriture des matériaux différents sans renoncer à la rigueur conceptuelle », l’élément fédérateur devait être un « “style” capable de métaboliser les différentes influences2… ».

L’héritage spectral

L’héritage que Romitelli se proposait de « recueillir » est multiple. Marqué par le Ligeti des années soixante, avec lequel il partage le souci d’agir par l’écriture du détail sur la couleur globale du son, le compositeur trouvera pourtant une impulsion plus déterminante encore dans les avancées du courant spectral français. L’univers minéral de l’imposant Saturne de Hugues Dufourt produit sur lui un effet considérable, confortant et élargissant celle ouverte par les premiers succès de Grisey et Murail, dont l’influence est la plus directement perceptible dans Nell’alto dei giorni immobili (1990). Ce sextuor reprend aux seconds les harmonies fusionnantes, ainsi qu’un régime dynamique par poussées successives développant l’attaque de la note fondamentale, et au premier la sonorité de la guitare électrique. Avec un effectif assez proche, La sabbia del tempo (1991) témoigne d’une approche plus formalisée de la synthèse spectrale et confirme l’intérêt du compositeur pour la dynamique de processus, tout en soulignant sa façon de se démarquer de ses aînés par la recherche d’un temps suspendu bien davantage qu’évolutif et orienté. La question du temps, qui est au cœur de ces deux premiers opus publiés et pourrait presque les faire passer pour un diptyque, se manifeste dans le second par l’image de l’écoulement, suggérée par le sablier dans le poème de Gabriele d’Annunzio extrait des Madrigali dell’estate et figuré par le métronome qui fait irruption dans la pièce. Elle a pour corollaire un processus quasi symbolique et théâtral de dégradation, orienté vers la crise, modèle qui restera dominant dans la majorité des œuvres ultérieures.

Composé dans le cadre du cursus de l’Ircam, le quatuor à cordes avec électronique Natura morta con fiamme (1991-1992) témoigne d’une recherche sur l’intégration de la spatialisation à l’écriture qui n’aura pas de véritable suite. Plus significatifs que les sons de synthèse fixés sur support, auxquels Romitelli ne tardera pas à préférer la souplesse des claviers électroniques et des effets appliqués aux sons de guitare électrique, les sons captés très près du chevalet fournissent ici un matériau acoustique bruité qui, confronté aux harmonies consonantes fondées sur des spectres harmoniques, relève d’une dualité chère au courant spectral. Dans Les idoles du soleil (1992-1993), première partie du diptyque Mediterraneo, c’est l’écriture verticale, par blocs mis en vibration par les mouvements de détails, qui confortée par les intonations en quarts et en huitièmes de tons, témoigne d’une volonté de fusion acoustique.

Musiques électriques

L’autre versant de l’héritage qui s’impose à Romitelli échappe à la tradition de l’écriture ainsi qu’au « formalisme et [aux] dogmes sur la pureté du son musical3 » qu’il condamne volontiers : l’énergie du rock l’attire, même s’il en critique le manque d’inventivité harmonique, et les nouveaux horizons acoustiques explorés par les tenants du rock psychédélique à partir des années soixante manifestent selon lui certaines convergences, en tout cas pour ce qui concerne le résultat sonore, avec les recherches spectrales. On comprend dès lors qu’en faisant de ces convergences un axe central de sa démarche, le compositeur ne puisse se contenter d’un simple compromis entre les deux phases de son héritage, qui tiendrait davantage d’une esthétique new age que d’un véritable « travail sur l’écriture », mais se considère dans l’obligation d’en opérer une hybridation profonde. L’état initial de cette tentative de fusion est illustré par Cupio Dissolvi (1996) pour ensemble de quatorze interprètes, où l’irruption vers la fin de la pièce d’un orgue rock et d’une batterie très chargée en cymbale ride, quoique fortement connotée, manifeste déjà, par sa métrique irrégulière et sa basse puissante mais harmoniquement pervertie, une volonté de distanciation. Le sifflement initial, dans lequel on peut entendre les résidus d’un effet Larsen, est à l’origine d’une ample spirale descendante ; il relève des processus de chute et d’entropie que l’on peut compter au nombre des marqueurs stylistiques les plus forts du compositeur, ici en rapport direct avec le titre emprunté à l’épître de Paul au Philippiens (« Je souhaite me dissoudre ») ainsi qu’au vers d’Emily Dickinson, murmuré par les musiciens (« Great streets of silence led away »).

Appartenant au même triptyque, Lost (1997), hommage à Jim Morrison pour voix et quinze instruments fait la part plus belle encore à la basse électrique, qui pendant une cinquantaine de mesures observe un marquage harmonique directement inspiré de la musique pop. Mais ce substrat soutient une combinatoire qui n’est pas sans rappeler celle de Ligeti, dont l’influence se manifeste par les motifs géotropiques du piano ainsi que par l’utilisation d’un instrumentarium destiné à gauchir le timbre global ; le kazoo, joué par la soprano (ou mezzo ad libitum) et le pianiste, la flûte de pan, les harmonicas joués par cinq des instrumentistes ne sont guère éloignés de la flûte à coulisse ou de l’ocarina chers au maître hongrois. Les intonations (au quart de ton ou en deçà), parfois aussi juste « légèrement un peu plus bas », apparaissent ici comme des vestiges spectraux et rejoignent d’autres traits stylistiques saillants – vocalité voilée, voire rauque, exigée de l’interprète, cordes utilisées le plus souvent en harmoniques, ton ou demi-ton descendant érigé en motif principal – dans un tout représentatif de la fusion que cherche à opérer le compositeur. La pièce pour guitare électrique Trash TV Trance (2002) paraît la mieux à même de représenter le statut de cet instrument dans la production de Romitelli : voilé par le souffle de l’amplificateur et le « buzz » électrique, travesti la plupart du temps par des pédales effets qui le saturent et le défigurent, le son de la guitare prend une valeur iconique, indéfectiblement lié à l’expression « de la violence de l’aliénation massive et du processus de normalisation qui nous entoure4. »

Transe et paradis artificiels

Ces sons hallucinés, ces répétitions et transformations hypnotiques de motifs – la mise en boucle variée et corrompue constitue un modèle formel très fort chez le compositeur – sont bien sûr le fruit de l’intérêt profond et jamais démenti que Romitelli porte aux phénomènes de transe et de façon plus générale aux états altérés de la conscience. Pas exactement équivalentes mais fréquemment associées dans la poétique du compositeur, transe et substances psychotropes investissent explicitement les titres à partir de 1989 avec la pièce inédite Have your trip, puis Acid Dreams and Spanish Queens (1994). Avec son matériau engendré par modulation de fréquence et distorsion de spectres, EnTrance (1995) est probablement la dernière pièce à porter par sa sonorité même la marque d’un artisanat directement redevable à l’apport du spectralisme. Elle est aussi la première – et la seule –, à faire de sa propre exécution un rituel de transe en agissant directement, par l’alternance rapide d’inspirations et expirations forcées, sur la physiologie de la soprano, et dans une moindre mesure sur celle des instrumentistes à vent. Emprunté au Bardo Thödol (le Livre des morts tibétain, où il est question d’états de conscience et de perception dans l’au-delà), le texte, qui demeure cryptique puisqu’il s’agit d’une formule de mantra en langue tibétaine, est un exemple de la façon dont Romitelli, comme ses aînés spectraux, brouillera souvent la dimension sémantique du texte.

Suivront The Poppy in the Cloud (1999), pour chœur de voix blanches et ensemble, nouvelle allusion aux stupéfiants (« poppy » signifie « pavot »), où réapparaît le poème d’Emily Dickinson déjà entrevu dans Cupio Dissolvi, puis la trilogie Professor Bad Trip (1998-2000). Là, le propos est de « travailler sur les aspects musicaux reliés de la manière la plus directe à la perception des phénomènes décrits par Michaux […]5 » suite à ses expériences sur la mescaline et autres substances hallucinogènes. Les Trois études pour un autoportrait de Francis Bacon, source directe d’inspiration, déterminent un aspect formel important du triptyque, pour lequel « le même matériau est travaillé trois fois6 ». La Lesson 1, où la guitare avec distorsion rencontre le diapason à bouche, l’harmonica et le kazoo, exploite abondamment la répétition dont l’auditeur, perdant pied, finit par ne plus savoir exactement si elle est littérale ou non. L’électronique, à la fois camouflée et fortement présente dans l’aura de l’ensemble instrumental, se dévoile à découvert dans un postlude qui apparaît comme la résonance trouble de tout ce qui vient de se produire, comme perçue à travers le filtre d’une conscience altérée. D’apparence beaucoup plus fragmentée, la Lesson 2 sollicite un effectif similaire, augmenté d’une basse électrique jouée avec E-bow (archet électronique) et bottleneck. Le motif en demi-tons descendants, les accords planants de la troisième partie ou encore le balancement harmonique sur deux accords distants d’une tierce font partie de ces éléments récurrents, mais envisagés chaque fois sous un angle différent. La basse répétée et accélérée, qui intervient dans une deuxième partie très colorée par une ambiance rock, préfigure la fin déchaînée de la Lesson 3. Là, sans autre électronique que celle des pédales d’effets, l’espace acoustique saturé par un effet Larsen vit au rythme d’un battement cardiaque dont la brusque interruption prend inévitablement une valeur narrative. L’harmonie, principalement conçue en termes de torsion dans ce triptyque, vise à simuler une perception faussée par l’effet d’un psychotrope.

Objectiver un monde

Romitelli s’est clairement exprimé sur la fonction qu’il s’assignait en tant qu’artiste. En décidant de faire de ses œuvres « l’objectivation d’un monde7 », et plus particulièrement de la violence de celui-ci, il revendique un engagement dont l’une des formes est la résistance à la normalisation. Véritable modèle dans cette recherche, le Francis Bacon qui impressionne plus particulièrement le compositeur est celui de la manière tardive, qui concentre la violence par la réduction des moyens. La tâche de sang qui macule un sol clair dans Blood on the Floor gagne en pouvoir anxiogène grâce à sa mise en résonance par les murs oranges et informes d’une pièce exiguë dont les arêtes se dérobent. Autour des années deux mille, Romitelli donne l’impression d’hésiter entre deux pôles expressifs : celui du choc d’une part, celui du malaise diffus mais persistant d’autre part. Avec ses intonations gauchies et glissantes, ses sonorités fluides mais volontiers grinçantes, nourries entre autres par des doubles cordes en harmoniques et une guitare électrique avec E-bow sonnant presque comme des ondes Martenot, avec sa polarisation quasi ininterrompue sur un la, Blood on the floor, painting, 1986 (2000) relève plutôt de la seconde option et s’inscrit dans une constellation de pièces pour lesquelles le compositeur a traité avec une finesse particulière l’orchestration.

L’orchestre à cordes de The Nameless City (1997), divisé en trois groupes accordés de façon différente, est typique des moyens qu’emploie Romitelli pour déstabiliser l’écoute. Il est aussi le résultat d’une volonté de contrôler l’espace par l’écriture, qui joue ici le rôle qui pourrait être celui de l’électronique : « le matériau sonore du groupe II est réverbéré, “traité” et projeté dans un espace stéréophonique par les groupes I et III8. » Les modes de jeu dans les deux volets de Domeniche alla periferia dell’impero (1996 et 2001) contribuent de même à faire vaciller les repères : les sons diphoniques, parfois cumulés au glissando d’embouchure pour la flûte basse, les intonations microtonales à la dérive, la diffraction constante des cordes par le jeu en harmoniques visent la fusion du matériau et l’estompage des contours, pour un résultat jamais exempt d’une tension sourde.

Comme y invite lui-même le compositeur dans la notice de l’œuvre, il est tentant de voir en Amok Koma (2001) le processus même de l’objectivation musicale de la violence, où « l’idée de “processus musical” est seulement un prétexte [lui] permettant de rendre perceptible ce qui [l’]intéresse véritablement : l’avènement d’une violence cachée qui se révèle seulement par la dérive chaotique du matériau, par le rituel de sa destruction comme élément discursif porteur de forme ». Le couple formel « répétition/dégradation9 », déjà maintes fois observé, qui affecte ici les neuf instruments et aussi l’électronique, très vite imprévisible car non linéaire, prive l’auditeur du confort de l’anticipation. À une boucle rythmique insistante, rendue particulièrement oppressantes par une rythmique de grosse caisse et de cymbales hi-hat, à des figures dissymétriques de type aksak répondent des stases angoissantes, comme celle de la coda finale qui renvoie, à travers un miroir déformant, au geste initial d’anapeste scandée par un piano carillonné.

C’est par une forte polarisation, fondée principalement sur une légère scordatura de la corde grave de la guitare électrique, que Romitelli maintient l’unité de la pièce orchestrale Audiodrome - Dead City Radio (2003) malgré sa forme en sections courtes rythmée par une alternance d’impulsions et de repos. La référence à l’Alpensinfonie de Strauss, qui peut être associée d’un point de vue narratif à l’idée d’engloutissement – laquelle prend une fois encore la forme musicale d’un processus de détérioration d’un matériau simple –, relève d’une pratique rare chez le compositeur, que son rapport prudent avec l’histoire de la musique, à la fois respectueux et distancié, maintient le plus souvent à l’écart du jeu citationnel.

Vers la lumière

Ses deux derniers mois d’activité créatrice auront été consacrés, dans la fébrilité extrême d’un compositeur se sachant rattrapé par la maladie, à la réalisation de son « vidéo-opéra ». Appelant une perception synesthésique « totale » et même une « perte des repères10 », An Index of Metals (2003) pour soprano et onze instruments amplifiés est une œuvre tendue vers Georges Bataille et son projet de L’histoire de l’Œil. Les trois poèmes de Kenka Lekovitch entremêlent, comme l’indique leur titre-valise « Hellucination », les visions aliénées d’un enfer qui bout explicitement dans une petite cuillère et entraîne la corrosion, la chute et enfin la dissolution. Symbolique de la drogue, mais aussi métaux en fusion aux formes fluides sans cesse changeantes constituent une imagerie poétique qui appelle une lente entropie musicale. La citation tronquée, sans cesse interrompue et reprise du début d’un Shine on you crazy diamond (Pink Floyd) qui n’arrive pas à dépasser son premier accord, n’est que le stade initial de la détérioration d’un tissu sonore qui, à mesure de la progression dans un entrelacs d’ « intermezzi » et d’ « hellucinations », se charge de résidus bruités et gagne en rugosité électrique. Bien que l’invocation d’un rituel de transe, et même de « possession11 » relève d’une poétique déjà largement éprouvée par le compositeur, sa tendance à l’outrance, est l’une des manifestations du ton de manifeste que pointe Jean-Luc Plouvier 12 tout en soulignant son décalage avec la clarté de l’œuvre. Concernant le matériau vidéo, réalisé par Paolo Pachini et Leonardo Romoli sans recours aux techniques de synthèse, Romitelli insiste sur le fait qu’il a été soumis aux mêmes transformations informatiques que le son, comme s’il s’agissait d’unifier dans le même creuset deux flux de stimuli sensoriels de nature différente. En cherchant à susciter chez l’auditeur, au moins de façon métaphorique, un état de conscience biaisé, le compositeur tente de court-circuiter l’écoute intellectualisée et d’agir sur « les réactions physiologiques du corps13 ». S’il ne s’interdit pas à l’occasion, pour ce faire, une approche formalisée de l’écriture, il assoit cependant son artisanat sur un matériau finalement assez restreint, mais éprouvé, affûté, et qui, par son homogénéité, lui procure une empreinte stylistique forte. Romitelli a le sens du geste, celui qui lance une œuvre, le charge d’une impulsion énergétique décisive.

La mort prématurée de Fausto Romitelli aura probablement affecté la réception de son œuvre. Elle aura précipité, au sens quasi chimique du terme, la vision globale d’une production musicale qui, bien que cohérente, ne gagne sans doute pas à être idéalisée comme un sommet monolithique. Que le discours tenu sur cette musique, encore en partie figé par la tentation de l’hommage, puisse peu à peu se dédramatiser et rendre sereinement compte des spécificités de chaque œuvre, de ses forces et de ses faiblesses, ne pourra que servir un projet artistique qui, fruit d’ajustements constants, doit sa saveur autant aux questionnements et aux doutes qu’aux convictions qui animaient le compositeur.


  1. Entretien avec Véronique Brindeau, Accents, n° 15, septembre-décembre 2001, repris dans Alessandro Arbo (textes réunis par), Le corps électrique; voyage dans le son de Fausto Romitelli. L’Harmattan, 2005, p. 159.
  2. Fausto Romitelli, « Le compositeur comme virus », cf. Arbo, p. 132.
  3. « Attaquons le réel à sa racine », entretien avec Danielle Cohen-Levinas. Repris dans Arbo, 2005, p. 43.
  4. Entretien avec E. Denut, dans Musique actuelles, musique savante : Quelles interactions ?, L’Itinéraire/L’Harmattan, 2001. Repris dans Arbo, 2005, p. 163.
  5. Note d’intention de l’œuvre, publiée dans le programme du festival Musica, 2000. Repris dans Arbo, p. 135.
  6. Ibid, p. 137.
  7. Entretien avec Véronique Brindeau, Accents, n° 15, septembre-décembre 2001, repris dans Arbo, p. 161.
  8. Notice de la partition.
  9. Ibid.
  10. Note d’intention de l’œuvre.
  11. Ibid.
  12. Jean-Luc Plouvier, éditorial de la notice du CD/DVD, Cyprès CYP5622, p. 16.
  13. Entretien avec E. Denut, dans Musique actuelles, musique savante : Quelles interactions ?, L’Itinéraire/L’Harmattan, 2001, p. 76.
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