Witold Lutosławski étudie la piano et le violon et, à partir de 1927, la composition et la théorie avec Witold Maliszewski, ancien élève de Rimski-Korsakov, au conservatoire de Varsovie et à Hambourg. Il fréquente par ailleurs l’Université de Varsovie où il étudie les mathématiques. En 1936, il obtient son diplôme de piano et l’année suivante, de composition.
À la fin de ses études, son souhait de prolonger sa formation de compositeur à Paris est contrarié par la situation politique. Fait prisonnier de guerre par les allemands en 1939, il s’échappe et travaille comme pianiste dans les cafés de Varsovie de 1940 à 1945, en compagnie du pianiste et compositeur Andrzej Panufnik.
Ses premières compositions ont pour la plupart été perdues lors du soulèvement de Varsovie en 1944. Outre des œuvres pour piano et de musique de chambre, il commence à s’interesser au folklore polonais – dont il arrange de nombreuses pièces – terrain qu’il exploitera tout au long de sa carrière pour l’éducation musicale et la diffusion de la musique polonaise.
Sa dernière pièce d’avant-guerre Variations symphoniques, pourtant influencée par Stravinsky et Szymanowski, révèle le talent de Lutosławski et sera reprise à Paris dès 1946. De 1941 à 1947, il compose sa Première Symphonie, créée en 1948, qui, taxée de « formalisme », sera interdite pendant la période stalinienne.
Il continue toutefois à chercher ses propres moyens d’expression en parallèle d’œuvres de facture néo-bartókienne acceptables dans la Pologne sous contrôle soviétique (tels que les Préludes de danse). Un jalon décisif est franchi avec la Musique funèbre pour orchestre à cordes, composée en 1958, basée sur un thème dodécaphonique et débouchant sur un point de tension extrême exploitant le total chromatique sous formes d’agrégats et de clusters qui place l’œuvre dans la postérité de la Seconde école de Vienne plutôt que dans la proximité du réalisme socialiste. Mais Lutosławski n’adhérera jamais à l’esthétique et aux textures pointillistes de la musique sérielle de son époque et il développera progressivement une technique de composition ouverte, très personnelle, au sein de laquelle les exécutants se voient dévolu un certain degré de liberté dans l’interprétation de données musicales déterminées : le manifeste de cette technique dite d’ « aléatoire contrôlé » est une œuvre de 1961, Jeux vénitiens, qui établit la réputation internationale du compositeur.
La détente des relations internationales en tre l’Est et l’Ouest, propulse ses compositions au premier plan de la scène musicale, lui apportant de nombreuses commandes. Il voyage alors aux États-Unis et en Grande-Bretagne où il enseigne et où sa carrière s’épanouiera. Son quatuor à cordes (1964) est créé par le Quatuor LaSalle à Stockholm, le Livre pour orchestre, en 1968 à Hagen en Allemagne, Mi-parti au Concertgebouw d’Amsterdam en 1976, Novelette à Washington en 1980.
Il offre des partitions devenues classiques à des artistes tels que Peter Pears – Paroles tissées (1965) –, Rostropovitch – Concerto for Cello and Orchestra (1969-1970) –, Fischer-Dieskau – Les espaces du sommeil –, Ursula et Heinz Holliger – Double Concerto pour hautbois, harpe et orchestre de chambre (1969-1970) –, Anne-Sophie Mutter – Chain 2, Dialogue pour violon et orchestre (1984-1985) ou la version pour violon et orchestre de Partita (1984-1988) – ou encore Krystian Zimerman – Concerto pour piano.
Sa Quatrième Symphonie, commande du Los Angeles Philharmonic Orchestra à l’initiative d’Esa-Pekka Salonen, est créée en février 1993 sous la direction du compositeur. Elle reflète la conception lutosławskienne de la mélodie « expansive ».
Cet homme modeste est comblé d’honneurs, parmi lesquels le Premier Prix Grawemeyer, la Médaille d’or de la Royal Philharmonic Society, le Prix Ferrar Salat de la Reine d’Espagne, et en 1993 le Polar Music Prize ainsi que le Prix Inamori de la Fondation Kyoto.