Lou Silver Harrison est nĂ© le 14 mai 1917 Ă Portland, Oregon, oĂč il vit jusquâĂ lâĂąge de neuf ans. LâinstabilitĂ© professionnelle de son pĂšre contraint la famille Ă de frĂ©quents dĂ©mĂ©nagements dans le nord de la Californie. Le jeune garçon suit une scolaritĂ© dĂ©cousue mais reçoit une Ă©ducation artistique riche et variĂ©e, comprenant notamment des leçons de piano et de danse. DiplĂŽmĂ© de la Burlingame High School en dĂ©cembre 1934, Harrison sâinstalle lâannĂ©e suivante Ă San Francisco. Pendant sept ans, jusquâĂ lâĂ©tĂ© 1942, il y explore en profondeur lâensemble du rĂ©pertoire musical occidental, tout en dĂ©veloppant un grand intĂ©rĂȘt pour les musiques traditionnelles asiatiques. En 1935, il entre au San Francisco State College oĂč, pendant trois semestres, il Ă©tudie le cor, la clarinette, le clavecin, la flĂ»te Ă bec, et chante dans plusieurs ensembles vocaux. Il compose Six sonates pour clavecin (1934-1943) et Mass to St. Anthony (1939-1952). Ă lâUniversitĂ© de Californie Ă San Francisco, il suit le cours « Music of the Peoples of the World » dispensĂ© par Henry Cowell, dont il devient rapidement lâassistant, lâĂ©lĂšve en composition et lâami. GrĂące Ă Cowell, il entre en contact avec Charles Ives et Carl Ruggles, avec lesquels il entretiendra Ă©galement des liens amicaux et artistiques privilĂ©giĂ©s. De 1937 Ă 1942, Harrison travaille comme pianiste accompagnateur au DĂ©partement de danse du Mills College dâOakland et, pendant les sessions dâĂ©tĂ©, enseigne la composition pour la danse â Harrison retournera au Mills College en 1980, cette fois comme professeur de composition au DĂ©partement de musique. En 1938, il fait la connaissance de John Cage. De 1939 Ă 1941, ils organisent ensemble des sĂ©ries de concerts de percussion sur le campus du Mills College et dans la baie de San Francisco, oĂč sont jouĂ©es plusieurs compositions, dont Double Music (1941), pour quatuor de percussions, Ă©crit en collaboration avec Cage. En aoĂ»t 1942, Harrison sâinstalle Ă Los Angeles. Il suit alors le sĂ©minaire de composition dâArnold Schoenberg Ă lâUniversitĂ© de Los Angeles (UCLA) et compose la Suite pour piano (1943), dâinfluence sĂ©rielle.
Ă lâĂ©tĂ© 1943, Harrison part vivre Ă New York. Il collabore Ă la revue New Music, puis assiste Virgil Thomson comme critique musical du New York Herald Tribune. Le 5 avril 1946, il dirige la crĂ©ation mondiale de la Symphonie n° 3 de Charles Ives. Mais sous lâeffet de la vie trĂ©pidante et bruyante de New York, il fait une sĂ©vĂšre dĂ©pression nerveuse et est hospitalisĂ© pendant neuf mois. Il continue cependant Ă composer, notamment The Perilous Chapel (1949) et Solstice (1950). Pendant les Ă©tĂ©s 1949 et 1950, il occupe le poste de Directeur musical du Reed College Festival of Music and Theater de Portland et compose alors la musique de scĂšne pourMarriage at the Eiffel Tower (Jean Cocteau) et The Only Jealousy of Emer (William Butler Yeats). De 1951 Ă 1953, il est en rĂ©sidence au Black Mountain College, oĂč il enseigne lâharmonie, le contrepoint et les thĂ©ories sur lâintonation. En 1952, il obtient une premiĂšre Bourse Guggenheim et compose lâopĂ©ra Rapunzel.
Harrison retourne en Californie Ă lâĂ©tĂ© 1953 et sâinstalle lâannĂ©e suivante Ă Aptos, une petite communautĂ© rurale au sud de Santa Cruz. Il gagne dâabord sa vie comme pianiste accompagnateur, mais aussi en exerçant divers mĂ©tiers, parmi lesquels pompier de forĂȘt ou infirmier pour animaux. Sa prĂ©caritĂ© financiĂšre sâestompe avec lâobtention dâun seconde Bourse Guggenheim (1954), dâune bourse de la Fromm Foundation et dâune commande du Louisville Orchestra (1955), qui se concrĂ©tisera par la composition de Strict Songs (1955), pour huit barytons et orchestre. En 1959, il est en rĂ©sidence Ă Buffalo, oĂč il achĂšve son Concerto pour violon avec orchestre de percussions.
En avril 1961, grĂące Ă une Bourse Rockefeller, Harrison assiste Ă Tokyo aux rencontres musicales Est-Ouest. ImmĂ©diatement aprĂšs ces rencontres, il passe deux mois en CorĂ©e. LâannĂ©e suivante, il retourne Ă SĂ©oul pendant prĂšs de quatre mois, puis passe trois semaines Ă Taiwan. Pendant ces voyages, il Ă©tudie les musiques et les instruments locaux, qui inspireront des Ćuvres associant instruments occidentaux et asiatiques, comme Nova Odo (1961-1968), Pacifika Rondo (1963) ou le Concerto pour pipa (1997). En 1966, Harrison passe six mois Ă Oawaca, Mexique. LâannĂ©e suivante, il rencontre William Colvig, un ingĂ©nieur en Ă©lectricitĂ© et amateur de musique, qui sera son collaborateur et son compagnon jusquâau dĂ©cĂšs de Colvig en 2000. Pendant leurs trente-trois ans de vie commune, ils rĂ©sideront Ă Aptos dans un habitat de paille. Ensemble, ils construisent des instruments dont leur ensemble instrumental, lâAmerican Gamelan, appelĂ© aussi Old Granddad, que Harrison utilise notamment dans son second opĂ©ra, Young Caesar (1971-2000).
Dans les annĂ©es 1960 et 1970, Harrison prĂ©sente des centaines de concerts de musique traditionnelle chinoise et corĂ©enne Ă travers la Californie. Il approfondit son Ă©tude des diffĂ©rents systĂšmes dâintonation quâil enseignera lors du Berkeley World Music Festival en 1975. En 1976, il Ă©tudie aussi la musique pour gamelan, et lâannĂ©e suivante, commence Ă composer pour des gamelans authentiques, quâil combinera souvent avec des instruments solistes occidentaux, comme dans le Double Concerto pour violon, violoncelle et gamelan (1981-1982) et le Concerto pour piano avec gamelan javanais (1987). En 1983, il se rend pour la premiĂšre fois en IndonĂ©sie, profitant dâun voyage en Nouvelle-ZĂ©lande pour un dĂ©tour par Java. Lou Harrison meurt dâune crise cardiaque le 2 fĂ©vrier 2003 en se rendant Ă Columbus, Ohio, pour assister Ă un festival consacrĂ© Ă sa musique.