Johannes Kalitzke étudie la musique d’église à Cologne de 1974 à 1976, puis le piano, la direction d’orchestre et, avec York Höller, la composition à l’Académie de musique de Cologne. Grâce à une bourse de la Fondation d’études du peuple allemand, au début des années 1980, il vient étudier la musique électronique à l’Ircam où il est élève de Vinko Globokar, en même temps que celui de Hans Ulrich Humpert à Cologne.
Sa carrière commence en tant que chef d’orchestre : d’abord, de 1984 à 1990, au Musiktheater im Revier de Gelsenkirchen (Allemagne) — où il devient en 1986 Directeur du Forum für Neue Musik —, puis, à partir de 1991, pour l’ensemble musikFabrik dont il est également co-fondateur et directeur artistique. Il a depuis dirigé de nombreux ensembles et orchestres parmi lesquels Klangforum Wien, Collegium Novum Zürich, l’Ensemble Modern, les orchestres symphoniques de la NDR et de la BBC et l’orchestre Philharmonique de Munich.
Johannes Kalitzke insiste sur l’influence du cinéma et de la littérature dans son rapport à la composition : le cinéma pour l’importance du timing et la littérature pour sa proximité avec la musique dans le rapport au langage (ponctuation, sémantique, accentuation). Il se conçoit en conteur, rôle qui requiert pour le remplir une certaine dramaturgie et un sens de la hiérarchie, des contrastes et des dominantes. De fait, l’opéra et la musique de film — muets en l’occurrence — sont fortement représentés dans son catalogue : on peut citer notamment les musiques des films expressionnistes Die Weber (Friedrich Zelnik, 1927), Schatten (Arthur Robison, 1923) et Orlacs Hände (Robert Wiene, 1924). Mais ce rapport au récit s’étend aussi aux pièces instrumentales, comme le bien nommé concerto Story Teller (2016), où le violoncelle soliste endosse le rôle de narrateur, dans une œuvre inspirée par les images évocatrices et cauchemardesques du livre du photographe de mode Tim Walker. La critique la qualifie ainsi : « La relation entre le soliste et l’orchestre reflète la vaine révolte de l’individu contre le flot d’images des médias et les séductions sirupeuses et sucrées du monde de la consommation. »
Car la critique sociale est une constante dans le travail de Johannes Kalitzke. Si son bagage philosophique et littéraire lui sert à nourrir ses recherches sur des sujets de pièces théâtrales ou opératiques, le compositeur en use également pour situer sa propre musique dans son temps et son contexte social : « Composer, écrire de la littérature ou peindre, c’est pour moi l’école d’une perception différenciée. Et c’est de cela qu’il s’agit. Il faut déjà se battre pour cela, car aujourd’hui, la perception différenciée est plutôt empêchée par les médias ». Cette idée est peut-être à rapprocher de l’importance qu’il accorde aux différents degrés d’accentuation dans son rapport à la composition. En effet, le compositeur procède souvent avec un nombre limité de notes, à partir de très petites cellules sonores et rythmiques, dont l’enchainement varie. Ce modus operandi est particulièrement présent dans Kafka Complex, conçu sur deux décennies (1989-2006), mais paradoxalement l’interaction des éléments est finalement utilisée pour former un labyrinthe, thème cher au compositeur et qu’il approche également dans ses opéras Inferno (2006) et Die Besessenen (2009).
Johannes Kalitzke a également une activité d’enseignement : il est conférencier aux cours d’été de Darmstadt depuis 1996, ainsi qu’à l’école de musique de Graz. Il enseigne également pour le Conseil allemand de la musique et a donné des cours de direction d’orchestre à l’Académie d’été de Salzbourg et au Mozarteum (depuis 2015). Il a enfin été invité à l’école de musique Reina Sofia de Madrid et au Conservatoire de musique de Zurich.
Ses œuvres sont publiées par Boosey & Hawkes.
Bourses et récompenses
- Membre de l’Académie bavaroise des beaux-arts de Munich, 2015 ;
- Membre de l’Académie des Arts de Berlin, 2009 ;
- Bourse pour la Villa Massimo de Rome, 2003 ;
- Prix Bernd Alois Zimmermann de la ville de Cologne, 1990.