Dieter Schnebel commence des études de piano, de théorie et d’histoire de la musique au conservatoire de Fribourg et obtient en 1952 un diplôme de pédagogie musicale. Il suit dans le même temps les cours de Martin Heidegger à l’université de Fribourg. Il se consacre à la musicologie, la philosophie et la théologie protestante à l’université de Tübingen, puis étudie les techniques de la Seconde Ecole de Vienne et rencontre Luigi Nono, Pierre Boulez, Hans Werner Henze et Ernst Krenek aux cours d’été de Darmstadt.

Il est ensuite employé comme enseignant et pasteur à Kaiserslautern, Francfort-sur-le-Main et Munich. Un poste de professeur de musique expérimentale et de musicologie est créé spécialement pour lui à la Hochschule der Künste de Berlin en 1976, poste qu’il occupe jusqu’à devenir professeur émérite en 1995. Il est par ailleurs l’auteur de nombreux livres et essais de musicologie sur Bach, Beethoven, Schubert, Schumann, Wagner, Mahler et Debussy ou encore Cage et Kagel.

Compositeur sériel à l’origine — Stücke (1954-1955), dt 31,6 (1956-1958), Compositio (1955-1956) — Dieter Schnebel, gagné par l’anti-dogmatisme, entreprend de développer des concepts expérimentaux, notamment avec Glossolalie 61 (1961), Das Urteil (1959) et Ki-No (1963-1967) où il travaille la voix, du murmure au cri. Il compose aussi pour le répertoire sacré avec Für Stimmen (…missa est) (1956-1969), Missa (Dahlemer Messe) (1984-1987), Magnificat (1996-1997) et missa brevis (2000-2002).

En 1974 avec Maulwerke, qui explore la musique organique, et dans la suite des années 1970 avec Pan (1978) et Thanatos-Eros (1979), Dieter Schnebel développe ce qu’il appelle la musique psycho-analytique qui prend sa source dans sa propre analyse, une recherche pour laquelle il reçoit en 2011 le Sigmund-Freud-Kulturpreis, décerné à des non-psychanalystes qui abordent et utilisent cette discipline de manière créative et critique.

Avec la création de la troupe de théâtre Die Maulwerker à la fin de 1977, Dieter Schnebel parvient à systématiser son concept d’œuvre ouverte, partiellement inspiré par le mouvement Fluxus, où les musiciens sont invités à participer à des actions dans l’espace impliquant l’utilisation non-conventionnelle d’instruments et de voix, comme l’illustrent Harley Davidson (2000) pour neuf motos et trompette ainsi que Flipper (2002-2003) pour machines à sous, performers, instruments et bande. Die Maulwerker interviennent dans la plupart des créations des grandes œuvres scéniques de Dieter Schnebel : Totentanz (1989-1994), Museumsstücke I (1992-1993), Museumsstücke II (MoMA) (1994-1995), Schau-Stücke (1995-1997), N.N. (2000-2001), Fontana Mix DS (2002) et Kafka-Dramolette (2005-2008).

La musique de Dieter Schnebel exploite et recherche certaines limites, intégrant les pratiques gestuelles, théâtrales, les nouvelles techniques instrumentales et vocales, le silence — dans la lignée de John Cage — les bruits environnants, I’espace… Les partitions de Schnebel ne se proposent pas de fixer le résultat sonore définitif, mais au contraire d’indiquer un processus moteur de production du son.

En 1991, il reçoit le prix de la culture de Lahr et est le premier lauréat du prix européen de la musique d’église décerné par la ville de Schwäbisch Gmünd en 1999. Il est fait membre de l’Académie des arts de Berlin et de l’Académie libre des arts de Leipzig en 1991 et de l’Académie bavaroise des beaux-arts de Munich en 1995. En 2015, il reçoit la croix de l’Ordre du Mérite de la République fédérale allemande.

© Ircam-Centre Pompidou, 2020


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