mise à jour le 7 novembre 2022
© Franck Yeznikian

Alain Bancquart

Compositeur français né le 20 juin 1934 à Dieppe et décédé le 26 janvier 2022 à Paris.

Alain Bancquart effectue ses études au Conservatoire national supérieur de musique de Paris (violon, alto, musique de chambre, contrepoint, fugue, ainsi que composition avec Darius Milhaud puis Louis Saguer), puis occupe le poste de troisième alto soliste de l’Orchestre National de France de 1961 à 1973. Il devient Directeur Musical des Orchestres de Régions de l’ORTF en 1973-1974, puis Directeur Musical de l’Orchestre National de France en 1975-1976. En 1977, il est nommé Inspecteur de la Musique au Ministère de la Culture. Il occupe cette fonction jusqu’en 1984, et est parallèlement producteur à Radio France des « Perspectives du XXe siècle ». C’est à cette occasion qu’il rencontre Ivan Wyschnegradsky qui l’influencera dans son travail sur la microtonalité et les échelles sonores et rythmiques, porté par « la nécessité d’une franche rupture avec le système tonal1 ».

En 1984, Marc Bleuse l’appelle pour refondre le cursus de composition du Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris et pour ouvrir une classe de composition. Il crée la même année le CRISS (Collectif de Recherche Instrumentale de Synthèse Sonore) aux côtés de Hugues Dufourt et Tristan Murail, un organisme dont l’objectif est de mieux comprendre l’impact et le potentiel musical des nouvelles technologies électroniques alors encore peu étudiées.

Il participe également à la création du Centre de Documentation de Musique Contemporaine et à celle de l’association Musique Française d’Aujourd’hui en 1978, dont la mission sera d’aider les publications discographiques et vidéographiques de la création musicale française contemporaine. En 1995, il décide de prendre sa liberté vis-à-vis des institutions mais reste cependant responsable au Conservatoire de Paris d’un séminaire sur les « Nouveaux Intervalles ».

Alain Bancquart consacre l’ensemble de son travail à l’étude des micro-intervalles dès Thrène I en 1968, utilisant essentiellement les quarts de ton, et, en 1995, avec Solitude du Minotaure s’intéresse aux seizièmes de ton, accessibles sur le piano conçu par le compositeur Julián Carrillo. Il donne à la technique qu’il développe à cette occasion le nom de « composition de champs de durées par anamorphoses2 », où chaque mutation d’un ensemble de durées est l’anamorphose du précédent. Cette référence à l’anamorphose, un procédé largement utilisé à la Renaissance, période à laquelle le compositeur se réfère régulièrement, caractérise le modèle optique à partir duquel il pense.

« Pas de musique sans mystique, la création étant une éthique » déclare Paul Méfano en accompagnement d’un disque monographique consacré à son ami. En effet, une grande partie du catalogue d’Alain Bancquart, compositeur qui revendique son athéisme, « renoue dans le texte avec le sens du sacré3 » et prend appui sur des textes mystiques, notamment ceux du poète chrétien Jean-Claude Renard (Cinq Dits de Jean-Claude Renard, 1986-1987), Saint Jean de la Croix (Érotique voilée, 1974-1975), l’Apocalypse de Saint Jean (Symphonie n°III, 1983), le Cantique de Mesa de Paul Claudel dans Le Partage de Midi (Symphonie n°V, 1991-1992) ainsi que le Livre des morts égyptien (Cérémonial II et V, 1984-195). Presque tous les autres textes sont ceux de son épouse, la poétesse Marie-Claire Bancquart, soit mis en musique, soit écrits pour la composition d’une pièce. On y retrouve notamment Strophes (1970), Magique circonstancielle (1975), L’amant déserté (1978), Les tarots d’Ulysse (1984), Icare (1997), Au grand lit du monde (2009), Le cri peut être tendre, aussi (2013), Symphonie n°8, Viendrait peut-être Qui (2018) et Mo(r)t (2020).

Alain Bancquart s’est vu décerner le Grand Prix de la SACEM et le Grand Prix National de Musique. Il est édité par Henry Lemoine.


1. Cité par Pierre GERVASONI dans Le Monde, 31 janvier 2022

2. Alain BANCQUART, Musique : habiter le temps, Lyon, Éditions Symétrie, 2003, p. 74

3. Jean-Marc CHOUVEL, « Texte et musique dans l’œuvre de Alain Bancquart : Autour d’une analyse - Les Cinq dits de Jean-Claude Renard », Les Cahiers du CIREM (28-29), juin-septembre 1993, p. 67


© Ircam-Centre Pompidou, 2022

Sources

Site du compositeur, Henry Lemoine, Le Monde, France Musique

Liens Internet

(liens vérifiés en juin 2022).

Bibliographie

  • Alain BANCQUART, Il y a trace de nous, Paris, Delatour, 2020.
  • Alain BANCQUART, « Quelques années fructueuses », in Danielle COHEN-LEVINAS (ed.), Vingt-cinq ans de creation musicale contemporaine : L’Itinéraire en temps reel, Paris, Harmattan 1998.
  • Alain BANCQUART, Qui voyage le soir, Paris, Inactuelles, 2011.
  • Alain BANCQUART, Musique : Habiter le temps (préface de Franck C. Yeznikian), Lyon, Éditions Symétrie, 2003.
  • Les Cahiers du CIREM (28-29), juin-septembre 1993, numéro consacré à Alain Bancquart :
    • Julien DE GERANDO, « Alain Bancquart, Sonate pour piano : Esquisse analytique et reflexions esthetiques », p. 125-141
    • Michel RIGONI, « La cinquième symphonie, Partage de Midi : La longue durée dans l’histoire de la symphonie », p. 153-170
    • Michel FISCHER, « Thrène 2 et la Grande mélodie : Du constructivisme à l’explicatif », p. 81-111
    • Alain FERON, « Les trois quatuors à cordes d’Alain Bancquart », p. 143-152
    • Hugues DUFOURT, « Alain Bancquart : La forme et le fond », p. 171-174
    • Jean-Marc CHOUVEL, « Texte et musique dans l’oeuvre de Alain Bancquart : Autour d’une analyse - Les Cinq dits de Jean-Claude Renard », p. 67-80
    • Pierre-Albert CASTENET, « Les postulats primordiaux et le paradigme de modernité », p. 113-123
    • Alain BANCQUART, « Musique : Imaginaire, combinatoire - Essai sur la composition en micro-intervalles », p. 9-66
    • Pierre-Yves ARTAUD, « Le temps retrouvé », p. 125-126
  • Nicolas ROBERT, « La combinatoire systématique de l’imaginaire », in Digraphe (65), septembre 1993, p. 74-78.
  • Marie-Claire et Alain BANCQUART, « Les tarots d’Ulysse », in Les écrivains français et l’opéra, Cologne, DME 1986, p. 287-293.

Discographie

  • Alain BANCQUART, Racines, dans « Pianos Quart De Ton », 1 CD Shiiin, 2018, shiiin10.
  • Alain BANCQUART, Prologue ; Icare ; Labyrinthe/Miroir ; Solitude du Minotaure ; Meurtre ; Epilogue, dans « Le Livre Du Labyrinthe », 2 CD Mode, 2003, mode120-21.
  • Alain BANCQUART, « Amour Grand Terrible Champ Critique », Roland Auzet : percussions, 1 CD Tschann Libraire Musique, 2003, TLM 0903-01.
  • Alain BANCQUART, Habiter l’ambre, Martine Joste : piano, dans « The Carrillo 1/16 Tone Piano », 1 CD zeitklang, 2003, ez-14016.
  • Alain BANCQUART, Sonate pour flûte, pour flûtes en ut, alto et basse, Pierre-Yves Artaud : flûte, dans « Recital », 1 CD 2e2m, 1995, 2e2m 1004.
  • Alain BANCQUART, De l’étrange circulation de la sève, dans « Taïra / Bancquart / Goubaïdoulina / Mennesson / Louvier », 1 CD Adda, 1992, 581257.
  • Alain BANCQUART, D’une fougère bleue les veines ; Grande mélodie ; Cinq dits de Jean-Claude Renard, dans « Alain Bancquart - Ensemble 2E2M/Dir. Paul Méfano », 1 CD Adda, 1990, 581272.
  • Alain BANCQUART, Symphonie n°1, Orchestre National de France, Leif Segerstram : direction, dans « Symphonie N°1 / Duo Pour Flûte Et Violoncelle », 1 vinyle Erato, 1984, STU 71549.
  • Alain BANCQUART, « Thrène 1 Et 2 / L’Amant Déserté », 1 vinyle Sappho, 1978, S 001.