Le Michigan Trio est une suite de cinq pièces brèves écrites pour clarinette, violon et piano. L'envie d'écrire dans des formes très concentrées est curieusement chez moi, lorsque l'on sait qu'une bonne partie de mes œuvres nécéssite (outre de grands effectifs et/ou une lutherie électronique sophistiquée) la durée d'un concert entier, une idée assez ancienne. La question de la brièveté d'expression est pour moi un peu celle qui est posée de l'autre côté du miroir. Evidemment, on pense tout de suite à Webern, dont il me semble que, malgré l'accalmie qui a naturellement succédée à l'engouement dont ses œuvres furent l'objet autrefois, bon nombre de ses idées mériteraient un examen attentif et nouveau. Il n'est certes pas plus aisé de s'exprimer en peu de temps que lorsque l'on dispose d'un bon quart d'heure et c'est une erreur fréquente de dire que, pour cela, l'on doit s'exprimer de manière différente, que l'on doit directement aller à l'essentiel en évitant tout développement superflu etc... Je pense tout simplement – c'est une manière de dire – que dans ce cas l'on exprime des choses différentes, des évenements qui ne pourraient pas l'être dans un contexte plus vaste car ils ne rescelent pas en eux un devenir quelconque ni ne donnent naissance à tel ou tel processus. Le secret réside probablement dans le choix et dans la morphologie des matériaux présentés qui doivent offrir autant de points de focalisation et ne nécéssiter ni insistance ni commentaire pour pouvoir être « compris ».
Philippe Manoury, décembre 1992.