J’ai réalisé cette pièce à partir d’une collection de sons de piano acoustique assez brefs que j’ai enregistrés avec l’idée de les prolonger et de les transformer ensuite par des moyens numériques, afin de provoquer la naissance d’une myriade de classes, dont quelques-unes retiennent quelques caractéristiques morphologiques et énergétiques d’origine, tandis que d’autres constituent des mutations radicales. C’est donc un « consort électronique » à 48 pistes réelles que j’ai produit, où les sons de piano dépassent leurs comportements acoustiques habituels, étant projetés par-dessus de leurs causes et éloignés de leur rayonnement naturel. Ce n’est donc pas une imitation - dégradation d’un noble instrument acoustique (le piano) qui est l’objectif posé, mais, au contraire, un changement positif d’ontologie (vers l’électroacoustique). Le réseau transformationnel employé comporte des granulations, des agglutinations, des micro-montages algorithmiques et manuels. Mais toutes les matières ont passé, soit en amont ou en aval, par des processus « prismatiques » de convolution, une technique numérique de croissement des attributs morphologiques qui permet de créer des objets nouveaux à partir d’une interaction forte entre ces attributs, interaction dépendante de la nature des morphologies elles-mêmes, ainsi que des points temporels initiaux de chaque « couplage » (ceci se passe, naturellement, dans le domaine du micro-temps, bien que les conséquences se laissent sentir à toutes les échelles temporelles possibles).
Horacio Vaggione. Note ZKM, Karlsruhe, 2012