L’écriture pour instruments solo a toujours occupé une place importante dans mes productions. Probablement car ces œuvres permettent d’étudier en profondeur la nature spécifique d’un instrument et sont toujours l’occasion de très riches rencontres avec les musiciens. Le titre de l’œuvre renvoie à l’idée d’introspection : étude anatomique de la dimension visuelle et sonore de l’instrument. La complexité du mécanisme du clavecin se révélant d’autant plus qu’on l’observe de près…
Lors d’une visite d’une exposition d’art contemporain à Paris, j’ai découvert le travail d’un jeune artiste italien, Yuri Ancarani, qui présentait un travail basé sur des films médicaux réalisés au moyen de micro-caméras disposées à l’intérieur du corps humain. La plasticité du résultat et la manière de traiter ces images permettait d’en ôter tout contexte sensible au profit d’une perception abstraite. En observant la complexité du système de sautereaux, il est fascinant d’en mesurer la précision et les connexions multiples entre de toute petites pièces de bois, de métal, de cuir. Un peu comme dans le corps humain, une simple action (la mise en vibration d’une corde) est le résultat d’une multitude de connexions entre de nombreux éléments. Cette particularité, généralement invisible pour le public est précisément devenue le point de départ de cette composition.
Mais au-delà d’un travail consistant à « révéler » par l’image et le son la nature « atomique » du clavecin, j’ai eu également envie d’en expérimenter la résistance. Probablement pour contrarier un peu (et non sans humour) la nature un peu précieuse de cet instrument, dont le côté muséal cherche souvent à être préservé. De fait, certaines manipulations qui ont été filmées dépasse le cap du jeu normal et mettent les mécanismes à rude épreuve ! C’est ici que se situe l’axe dramaturgique de ce projet (repousser les limites, manipuler de manière étrange un instrument si précieux…) et l’articulation entre l’interprète sur scène, son instrument, et les images dans la vidéo.