C'est en lisant de façon répétée et approfondie les œuvres de Varèse que j'ai désiré écrire une pièce qui serait dédiée à sa mémoire.
Ici l'importance du rythme est primordiale. Sans faire abstraction de mélodies souvent présentes, c'est la rigueur rythmique qui entraîne la conception architecturale de l'ensemble. La rigidité réside surtout dans la volonté de soumettre les figures environnantes – introduites en toute liberté – au cheminement imperturbable et catégorique du rythme. Les effets rythmiques peuvent être réciproques et simultanés, et se superposer à des combinaisons de timbres qui colorent et différencient les divers plans et volumes de l'œuvre.
La densité du contenu est déterminée et réglée par des éclats complètement subjectifs. Pas de symétrie ni de construction hasardeuse des évènements : seule l'irrationalité du temps s'écoute. Mais les dessins peuvent être suivis clairement, la fonction principale étant d'établir une relation directe entre rythme et forme.
La forme relève d'une succession d'états alternatifs, opposés ou corrélatifs. Des éléments indépendants, des groupes combinés ou non de ces éléments interviennent à des laps de temps prévus mais toujours irréguliers. Les accords gigantesques, par exemple, marquent les moments clés de l'œuvre mais sans s'y arrêter.
En marge des hasards possibles de la pensée – fluctuante malgré tout – intervient le désir essentiel de conduire et de construire rythmiquement l'énergie interne de cette œuvre, jusqu'à la plus petite structure, et l'accroître selon plusieurs formes sans cesse en action.
Ce qui a provoqué la stimulation dans l'élaboration de cette pièce c'est essentiellement le dynamisme et la force qui se dégagent des propres œuvres de Varèse.
La forme émane toujours d'un processus.
Philippe Fénelon.