Laissons Frank Zappa décrire The Black Page en ses propres termes toujours très colorés sur un rythme funk devant un auditoire survolté à New York.
« Bien ! Maintenant, regardez ça (bruits de foule, petits cris excités). Je vais vous parler de cette chanson. Cette chanson était à l'origine un solo de batterie (sifflements d'admiration). Exactement. Ensuite une fois que Terry a appris à jouer The Black Page à la batterie, je me suis dit que peut-être, il serait bon pour d'autres instruments. Donc j'ai écrit une mélodie qui allait avec le solo de batterie et cela a donné The Black Page part I, la version « hard ». (Rires complices.) »
Zappa continue son analyse détaillée et savante pour habilement préparer son public à savourer la version diluée, au caractère franchement plus commercial, intitulée The-Easy-Teen-Age, New-York-Version. Ce génial exposé, dont l'essence même transcende les limites de l'esprit humain, nous livre finalement le secret ultime du Black Page en ces quelques mots qui devraient sans doute faire rougir de honte nos plus grands musicologues : « ...melody of The Black Page, but couldn't really approach its statistical density in its basic form. » Voilà, tout y est, le mot est lancé : la densité statistique dans sa forme de base. Il fallait y penser, non ? Frank Zappa, ce musicien « stochastique » inavoué, est à redécouvrir sous un angle complètement différent.
Walter Boudreau, programme du Festival Agora, Paris 1999.