Messe, un jour ordinaire s’articule principalement autour de deux textes : celui du rituel de la messe (« l’Ordinaire de la messe », que l’on chante tous les jours) et la parole dérisoire de Laurence, jeune femme à la dérive, toxicomane ordinaire (aujourd’hui disparue), tirée d’un document filmé de Jean Michel Carré, « Galère de femmes ».
Elle met ainsi en présence une parole collective – parole véhémente, fracassante, sûre de ses valeurs, sûre de son ordre – et une parole individuelle, modeste, minime, humaine et négligeable.
Dans ce contexte tragi-comique et un peu graveleux les mots de la messe (chantés par le chœur et deux solistes éloquents) vont s’user au fur et à mesure de leur répétition jusqu’à se vider de leur sens et ne plus exprimer que quelques réflexes agressifs et conditionnés. « Rex ! Roi-roi, King ! Gloire ! » « syndrome de la magnificence » caractéristique du groupe.
Le chœur et solistes seront soutenus par un orgue (écriture immuable et primitive), des cuivres tonitruants, une débauche de cloches et quelques pauvres traits d’accordéons.
« Fraîchement » sortie de prison, Laurence tente une série de démarches auprès d’une association caritative où elle obtiendra en consolation une paire de bottines presque à sa taille. Sa voix est plus modeste, moins puissante, parfois dé-timbrée, bien plus proche des mots ; un violon précède, soutient ou commente ses mots. Ses demandes vont perturber et agresser le groupe jusqu’à déstabiliser le bon ordre de la liturgie.
A la dérive, de Heilig (Saint), Heiliger Geist (Saint Esprit), Heiliges Reich (Saint Royaume), Heiliges Fleisch (Sainte Viande) à une phrase de Klaus Barbie « Herr Präsident, ich habe nichts zu sagen » (Monsieur le Président je n’ai rien à dire) la liturgie se radicalise jusqu’à se détruire piteusement.
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Enfin, sur quelques sons suspendus, la partition se repose sur des mots étranges et doux, simples et forts : « doucement, lorsque le jour monte, les ombres se mettent à danser secrètement, et la lune vertige, avance, à pas de ciel vers l’aube », mots écrits par Nathalie Méfano à qui cette œuvre est aussi une sorte d’hommage.