Étude sur des interpolations rythmiques, développées auparavant dans des œuvres comme Sculpture II, Ground ou Zona, Kraft marque le début de l’utilisation par Lindberg de l’ordinateur comme outil de composition assistée. Il passa un an, sur les deux années que dura la composition de cette œuvre massive, à concevoir l’environnement informatique qui devait lui servir ensuite à calculer les proportions et les transformations rythmiques et harmoniques complexes. Kraft a été écrit à Paris (1983), à Berlin (1984) et à Helsinki (1985).
L’ensemble des solistes constitue la clef de voûte de l’orchestre, le catalyseur de l’action et le sommet de l’iceberg formé par l’énorme masse sonore. Tous les membres de l’ensemble jouent, en plus de leurs instruments premiers, de nombreux instruments de percussion, surtout métalliques, collectés chez un ferrailleur. La musique est spatialisée dans l’espace par un système de haut-parleurs et par les déplacements des solistes, y compris du chef d’orchestre, pendant l’exécution. Dans sa globalité, Kraft se divise en deux grands mouvements, suivis d’une coda relativement longue.
Pièce très forte et originale, Kraft apparut vite comme l’œuvre phare de Lindberg. Après la première, remarquée par le grand public, au festival d’Helsinki en 1985, elle devint lauréate de la Tribune des compositeurs à l’Unesco en 1986. Elle reçut également le prix du Conseil nordique en 1986, et l’enregistrement, effectué à Stockholm et publié par Finlandia Records, fut primé par le prix Koussevitsky en 1988.
Risto Nieminen, « Magnus Lindberg », Les Cahiers de l'Ircam, coll. « Compositeurs d'Aujourd'hui » n° 3.