Le Concerto op. 24 pour neuf instruments voit le jour au cours de cette période de la vie créatrice d’Anton Webern que Pierre Boulez qualifie de « didactique », durant laquelle sa technique dodécaphonique s’affirme et se condense. Dans le Concerto, la série choisie porte en germe l’architecture de l’œuvre, à toutes les échelles. Dédicacée à Arnold Schoenberg pour son soixantième anniversaire, l’adresse est soulignée par le « carré magique » sur lequel Webern s’appuie pour sa série, le fameux palindrome latin :
S A T O R
A R E P O
T E N E T
O P E R A
R O T A S
qui signifie en substance : « Le laboureur guidant la charrue travaille en tournant » ou encore « Le semeur Arepo conduit les roues avec soin » (si l’on considère le mot Arepo, qui n’apparaît, dans toute la littérature, que dans ce carré magique ou presque, comme un prénom en référence au dieu égyptien Apis, par exemple). Modelant sa série sur les différentes directions et sens de lecture du carré magique (« en tournant »), Webern donne au matériau une véritable dimension contrapuntique et harmonique.
Jérémie Szpirglas, programme du concert du 16 juin 2011, festival Agora.