Au-delà des motifs décoratifs aux figures géométriques régulières, les entrelacs figuraient souvent dans l'art ancien l'ondulation et le chevauchement des vagues ou la vibration de l'air. Plus récemment, ils schématisent les connections et interactions complexes d'un niveau de réalité inaccessible à nos sens (réseau de communication, neurobiologie, physique des particules). Ils évoqueront aussi l'union d'éléments indépendants cohabitant harmonieusement. C'est pourquoi le titre de cette pièce ne désigne pas objectivement un résultat musical, un quelconque procédé d'écriture, et moins encore, une préoccupation de nature ornementale ; la puissance d'évocation symbolique et le vaste potentiel de représentation schématique que ce terme recouvre lui donnent une autre dimension, porteuse d'une certaine « poétique ondulatoire » au service de l'imaginaire et de sa matérialisation. L'unification et l'homogénéité des timbres dans un discours souvent monodique (ou plutôt collectif), renforce l'aspect linéaire de l'écriture d'Entrelacs. Dans cette pièce, la ligne, animée d'une pulsation interne, est considérée comme un vecteur. Entité dynamique, élastique, elle déroule de sinueuses symétries, subissant torsions et étirements jusqu'a la cassure, où elle se prête volontiers à des chorégraphies éphémères. La ligne est aussi le trait réel ou imaginaire séparant les choses ; elle devient alors une limite, une frontière. De cette notion découle une évolution formelle où les contrastes et les changements abrupts de directions constituant les différentes parties de la pièce sont autant de moyens de retrouver le chemin initial.
Yan Maresz.