L’œuvre, sous-titrée Treize images des pays sombres, suit un programme précis organisé en treize sections dont les titres montrent assez le contenu délibérément symbolique : Night of the electric insects (Nuit des insectes électriques), Lost Bells (Cloches perdues), Dance macabre (Danse macabre), Sounds of bones and flutes (Sons d’os et de flutes), God-music (Musique de dieu), Devil music (Musique du diable), etc. Dans le même ordre d’esprit, la sixième section, Pavana lacrimæ, cite presque textuellement le début du deuxième mouvement du quatuor de Schubert La jeune fille et la mort. Les treize sections sont jouées en solo, en duo, en trio ou en quatuor. Elles s’enchaînent dans l’ordre suivant : quatuor - trio - duo - solo - duo - trio - quatuor- trio duo - solo - duo - trio - quatuor. On a là un exemple de palindrome et l’on constate que seules les sections 1, 7 et l3 font intervenir l’ensemble des quatre instruments.
Tout était sans dessus dessous. Des choses terribles flottaient dans l’air… ils trouvèrent leur voie vers les Anges Noirs (Black Angels).
Le symbolisme numérologique de Black Ange/s, bien qu’il ne soit pas immédiatement perceptible à l’oreille, est néanmoins fidèlement reflété par la structure musicale. Ces liens « magiques » sont différemment exprimés. Par exemple, en terme de longueur, groupements de sons isolés, durées, motif de répétitions, etc. On y trouve plusieurs allusions à la musique tonale : une citation de La Jeune fille et /a mort de Schubert, une Sarabande originale ; une tonalité prolongée en si majeur de Musique de Dieu ; et plusieurs références à la section latine Dies Irae. L’œuvre abonde en symbolismes musicaux conventionnels, tels que le Diabolus in Musica (l’intervalle de triton) et le Tnilo di diavolo (la trille du diable d’après Tartini).
George Crumb, programme du Festival Musica 96.