Trois œuvres pour choeur a capella sur des textes en slavon. langue liturgique de l'église orthodoxe russe :
La liste chronologique des œuvres religieuses de Stravinsky s'ouvre sur trois petits chœurs mixtes a capella : Pater Noster, Credo et Ave Maria destinés au rituel de l'église orthodoxe et dont une version latine parut en 1949, pour l'usage de l'église catholique. Avec la Messe, ce sont les seules pièces proprement liturgiques de Stravinsky. Bien que composées à plusieurs années de distance elles présentent entre elles une parfaite unité d'écriture, qui n'est pas tellement due aux exigences de la facilité d'exécution qu'au parti stylistique qu'a tiré Stravinsky de moyens limités. Les trois chœurs sont homophoniques et chacun d'eux n'emploie qu'un seul mode. L'ambitus de chaque voix est extrêmement restreint, sauf celui du ténor, relativement mobile. De toutes les voix, celle du soprano est la plus statique et se rapproche de la psalmodie. L'harmonie, diatonique, comporte des dissonances résultant de l'indépendance mélodique des parties et non d'accords catalogués. Le Pater Noster et l'Ave Maria sont composés l'un et l'autre d'un seul motif qui se répète sur le déroulement du texte, uniquement varié par les contractions et les dilatations, issues du chant grégorien, qui forment la trame de toute la musique de Stravinsky. Le Credo se distingue des deux autres chœurs par sa liberté métrique. Il est dépourvu de mesure et même, au début de chaque verset, de notation rythmique, chaque séquence commençant par une psalmodie en tutti sur un même accord, en valeurs courtes (non notées) et se terminant par une cadence polyphonique en valeurs longues. Quand en 1948, Stravinsky composera la Messe, il se souviendra de ces trois chœurs.
André Souris, « Le sens du sacré dans la musique de Stravinsky » in Encyclopédie des musiques sacrées, 1971 Programme du Festival d'Automne à Paris, 1980