Compositeur et chef d’orchestre américain, Bernard Herrmann étudie entre 1929 et 1933 à DeWitt Clinton High School, à la Juilliard School et à l’Université de New York où il travaille la direction d’orchestre avec Albert Stoessel et la composition avec Bernard Wagenaar puis avec Percy Grainger. C’est surtout auprès de ce dernier que Herrmann s’épanouira, Grainger ayant décelé son talent original et son goût pour la recherche de sonorités et d’atmosphères inédites. Il fonde en 1933 le New Chamber Orchestra où il dirige surtout la musique contemporaine, et en particulier la musique britannique dont son goût toujours avoué date de la même époque. Nommé assistant chef d’orchestre à la CBS en 1934, il compose ses premières musiques de scène pour la radio où il continuera d’exercer pendant une vingtaine d’années. Mais ce sont surtout les années 30 qui marquent ses expériences les plus marquantes composant et dirigeant pour de nombreuses séries des musiques qui affinent à la fois son style personnel et son savoir-faire dans des partitions écrites rapidement, sous forme de courtes séquences et pour des ensembles en général réduits : parallèlement aux programmes du « Columbia Workshop » (75 partitions) ou de « Suspense » (22), Herrmann profitera principalement de la collaboration avec Orson Welles en 1938 dans la série du « Mercury Theatre on the Air » (22) qui deviendra de 1938 à 1940, sous une forme plus édulcorée, le « Campbell Playhouse » (56). La télévision sollicitera également Herrmann qui travaillera pour de nombreuses séries, telles Suspicion (The Alfred Hitchcock Hour, 1962-1965), The Virginian et surtout dans vingt-trois épisodes de The Twilight Zone (La quatrième dimension) où il a fait preuve d’une invention aussi remarquable qu’inattendue.
Parallèlement à cette intense production, Herrmann n’a cessé de composer pour le concert depuis 1929, avec une grande porosité entre ses propres musiques et les musiques radiophoniques, puis du cinéma dont il tirera à l’inverse plusieurs suites orchestrales. Il faut garder en mémoire certaines de ses œuvres personnelles, auxquelles il a consacré le meilleur de son talent, en particulier dans son opéra Wutherings Heights, marquant encore une fois son goût pour les sujets sombres et tourmentés, et auquel il a travaillé de 1943 à 1951.
Sa carrière de compositeur au cinéma débute brillamment en 1941 grâce à Welles avec Citizen Kane pour la RKO, puis l’année suivante pour La Splendeur des Amberson (il refusera d’être crédité au générique à sa demande, suite au remontage scandaleux du film opéré par la production indépendamment du réalisateur). Cette expérience lui permettra de travailler pour nombre de grands réalisateurs de Hollywood, de Brahm, Curtiz, Hathaway, Ray, Dieterle ou Mankiewicz pour ne citer qu’eux. Sa gloire dans ce domaine, masquant parfois ses autres réussites, correspond à sa collaboration avec Hitchcock, de 1955 à 1966 dans neuf films dont Vertigo(Sueurs froides),North by Northwest(La Mort aux trousses) ouPsycho(Psychose). C’est Hitchcock qui mettra brutalement fin à cette collaboration exceptionnelle en refusant la partition écrite pourTorn Curtain(Le Rideau déchiré). Souffrant beaucoup de cette rupture, Herrmann participera à divers films sans renouer avec la grande continuité qui avait marqué les années Hitchcock, et sera appelé dans la dernière partie de sa carrière par des réalisateurs comme Truffaut pourFahrenheit 451puis pourLa Mariée était en noir qui marquera une collaboration difficile, et surtout Brian De Palma qui le demandera pourSistersetObsession, et Martin Scorsese pour la musique fascinante deTaxi Driver (le film étant sorti après la mort de Herrmann, le réalisateur le lui dédiera au générique avec « respect et gratitude »).