Le titre de la pièce est emprunté au recueil de poèmes du poète américain William Carlos Williams, The Desert Music. J'en ai sélectionné plusieurs extraits, arrangés, et il n'y a donc pas d'utilisation d'un texte dans son intégralité. Cet arrangement a constitué ma première activité compositionnelle, et a donné la forme générale à la pièce, un arche ample de cinq mouvements (A-B-C-B-A) qui suit le texte.
Le premier et le cinquième mouvements sont rapides et utilisent le même cycle harmonique. Le deuxième, et le quatrième, d'un tempo lent partagent le même texte (« Well, shall we / think or listen ») et le même cycle harmonique, différent de celui des mouvements I et V. Le mouvement central est le plus long et est lui-même structuré en arche (A-B-A).
Les sections A sont lentes et la section B s'élève jusqu'au tempo modéré des 2e et 4e mouvements. Le troisième mouvement a son propre cycle harmonique. Il n'y a pas de pauses entre les mouvements et la pièce est jouée « attacca » du début à la fin. Le changement de tempo entre les Mouvements se déroule soudainement par une modulation métrique.
Suivant l'arrangement du texte, trois cycles d'harmonies furent composés pour servir de base aux mouvements individuels. Les trois cycles sont présentés comme des séries d'accords répétitifs, similaires en rythme aux pulsations de Music for 18 musicians, mais plus chromatiques et sombres, afin de correspondre à l'esprit de The Desert Music. Dans la partition de The Desert Music, j'ai voulu utiliser tous les instruments de l'orchestre pour jouer les modèles mélodiques répétitifs et entrecroisés, que l'on retrouve habituellement dans mes compositions précédentes. Chaque groupe est légèrement doublé par un synthétiseur afin de maintenir l'entièreté du profil rythmique.
Le chœur, tout au long de la pièce, est supporté par les instruments à vent ou par les cuivres en sourdine. Ceci est, bien sûr, une vieille technique, mais elle aide à créer ce mélange de sonorités vocales et instrumentales qui m'occupe depuis Drumming, composé en 1971. Pour accroître ce son instrumental vocal, le chœur et les instruments à vent sont amplifiés et mixés ensemble. La percussion est omniprésente et parfois la pulsation continue est soutenue par deux pianos. Ça et là, on entend des maracas, des coups secs de baguettes, la grosse caisse, le tympanon et le tam-tam.
La pulsation qui entame et clôture The Desert Music, récurrente pendant toute la composition, trouve une signification comme élément musical et comme réponse et commentaire au texte lui-même. Musicalement, elle présente les cycles harmoniques des mouvements comme un choral ; du point du vue du texte, les syllabes vocalisées constituent une réponse sans paroles à « Well shall we think or listen ?... » des second et quatrième mouvements. Cet oscillement constant de I'attention entre la signification des mots et leur facon de sonner est une des préoccupations principales de The Desert Music.
Steve Reich, Ars Musica 92.