Ces six Miniatures peuvent être jouées selon deux ordres qui modifient complètement leur perception. L'ordre initial – de 1 à 6 – fait entendre six pièces autonomes séparées les unes des autres par un léger silence, et s'enchaînant selon des oppositions très marquées (tension/détente ou vif/lent).
Le deuxième ordre – 1, 4, 2, 5, 3, 6 – propose au contraire une œuvre en un seul mouvement, les six pièces s'enchaînant sans interruption. Alors que dans l'ordre 1, ces pièces semblent assez courtes, ramassées, hétérogènes, donnant l'impression d'un temps rapide et nerveux, l'ordre 2 procure au contraire l'impression d'une pièce lente, où l'aspect rythmique apparaît davantage faire partie d'un flux continu. Les six Miniatures sont en effet la première pièce où le compositeur a réintégré de véritables motifs rythmiques, voire un certain swing venu du jazz.
Chacune des trois premières Miniatures utilise deux « situations musicales » très caractéristiques (une de départ/une d'arrivée), qui réapparaissent dans les trois suivantes dans un ordre différent. Ces « situations musicales », qui ne correspondent à aucun matériau préétabli, sont caractérisées par des configurations particulières d'agrégats, de spectres, de cellules rythmiques ou de hauteurs. Chaque Miniature s'organise autour d'un processus directionnel non linéaire chargé de construire un trajet continu entre deux de ces situations musicales opposées. Les zones intermédiaires, qui relèvent simultanément des deux situations, sont donc perçues de façon ambiguë, à la façon des anamorphoses ou des trompe-l'œil utilisés dans les arts visuels. Plus précisément, la perception de ces Miniatures oscille généralement entre la perception globale d'un timbre et la perception différenciée d'une polyphonie.
L'écriture de la pièce a bénéficié de programmes informatiques réalisés par Francis Courtot à l'Ircam.
Guy Lelong, programme du concert EIC, Cité de la Musique, 20 novembre 1996.