- Informations générales
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Date de composition :
1977
Dates de révision : 2020
- Durée : 30 mn
- Éditeur : Breitkopf & Härtel, nº EB 8399
- Commande : Wilhelm Bruck et Theodor Ross
- Dédicace : Dans le texte de présentation : « La pièce est dédiée à lui [Christopher Caudwell] et à tous les outsiders qui, parce qu'ils dérangent l'irréflexion, sont vite mis dans un même sac avec les destructeurs »
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Livret (détail, auteur) :
Christopher Caudwell, Bürgerliche Illusion und Wirklichkeit, Friedrich Nietzsche, Also sprach Zarathustra et Das trunkene Lied.
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Date de composition :
1977
- Genre
- Musique de chambre [Duo de cordes pincées]
- 2 guitares
Information sur la création
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Date :
3 décembre 1977
Lieu :Allemagne, Baden-Baden
Interprètes :Wilhelm Bruck et Theodor Ross : guitares.
Note de programme
Comme dans nombre de ses œuvres, sans préambule ni « introduction », le propos s'impose d'emblée : dès la première mesure, pour chaque guitare, l'indication erstickt (étouffé) produit un effet qui plonge l'auditeur dans un monde étrange. Toutefois, nul souci d'exotisme, puisque celui-ci ne se définit d'ordinaire que face à des sonorités « normales ». Et la norme, ici, c'est le son étouffé, si bien que les rares cordes vibrant à vide revêtent un caractère d'« extra-territorialité ». Quand le rythme se fige en une polyrythmie d'impulsions régulières, l'étrangeté (l'étouffement) envahit tout l'espace musical.
C'est le moment que choisit Helmut Lachenmann pour présenter le texte, ni chanté, ni récité, mais en quelque sorte psalmodié par les deux guitaristes, sur un rythme précisément noté (on pense à l'Histoire du soldat). La conjonction des contraintes de la diction (mit völlig neutralem Ausdruck gesprochen, quasi « laut gelesen » : diction la plus neutre possible, presque « lu à haute voix ») et de la grande difficulté d'exécution (pour le jeu, une partition aux signes complexes ; pour la diction, une autre partition dont les rapports avec la première ne sont pas toujours simples), cette conjonction fait que la sonorité ambiguë des voix, tendues dans l'effort, s'intègre à l'aspect insolite du monde sonore qui s'est mis en place. « Les lois et la technique » étant ainsi « façonnés », c'est un long glissando descendant, quasi conclusif, qui accompagne le dernier paragraphe du texte.
Dann werden wir sagen... Ces mots résonnent dans l'immobilisation progressive de la musique, qui se reconstruit ensuite pas à pas, dans un univers de sonorités libérées. L'invention musicale entraîne l'auditeur dans des pages d'un extrême raffinement, s'installe parfois dans l'introspection musicale d'un geste « bloqué » et aboutit, en guise de coda, à des résonances figées de musique espagnole ; la guitare, qui se souvient de ses origines, est simplement caressée du plat de la main.
Ces extraits de Illusion and Reality de Christopher Caudwell, ainsi que la citation de Ainsi parla Zarathoustra de Nietzsche (O Mensch, gib acht), donnent une idée précise du projet musical de Helmut Lachenmann :
Illusion and Reality
Weil eure Freiheit nur in einem Teil Es gibt keine neutrale Kunstwelt. Christopher Caudwell |
Votre liberté est incomplète parce qu'elle n'est enracinée que dans une partie de la société. Il n'y a pas d'univers artistique neutre.
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François Bohy, programme du Festival d'automne à Paris, cycle Helmut Lachenmann.
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