Le quatuor à cordes est un genre bien ancré dans l'histoire, à l'image de la pièce pour piano. Il m'autorise certaines expériences esthétiques, dans lesquelles le caractère sonore de l'instrument ou sa constellation instrumentale ne s'installe pas obligatoirement au premier plan. Par conséquent, il m'incite à réfléchir sur la relation entre moyens électroniques – plus précisément l'électronique live – et l'instrument.
L'électronique live signifie aujourd'hui encore, très souvent, enrichissement, embellissement et perfectionnement du son instrumental. Dans le meilleur des cas, on peut parler d'éclairage particulier ou de modélisation des sonorités. Mais, de toutes façons, elle doit jouer un rôle de subordination qu'on hésiterait à faire jouer à un instrumentiste. Ne peut-on se représenter une musique dans laquelle le système électronique live remplirait une fonction particulière, jouerait le rôle d'un instrument qui interprète une partie obligée ? Naturellement, elle ne peut, par essence, être un instrument, car elle ne produit aucun son, mais les transforme. Quoi qu'il en soit, elle pourrait être dotée de la flexibilité d'un instrument. Elle pourrait, par exemple, arriver à transformer individuellement chaque son de la partie instrumentale, approchant ainsi la caractéristique des instruments, leur production de sons uniques. Elle pourrait donc renverser les rapports et transformer un son dans différentes directions, donnant peut-être lieu à une sorte de polyphonie nouvelle.Bien entendu, il faut pouvoir disposer des conditions techniques, tous les systèmes d'effets ne pouvant pas être modifiés à la demande.
Quand j'ai commencé à travailler sur la station d'informatique musicale de l'Ircam, je me suis vite rendu compte qu'elle offrait de nombreuses possibilités, mais qu'il était nécessaire de créer un environnement de programmation spécial pour assurer l'organisation effective des processus. Le résultat en est un type d'électronique live qui provoque véritablement une manie du commentaire, et qui ne cherche plus du tout à dissimuler sa présence. Elle tend presque à déplacer le regard vers la source, le quatuor à cordes.
Thomas Hummel.