Piero della Francesca, Perspectiva pingendi
4 flûtes, 2 hautbois, 5 clarinettes, 4 bassons, saxophone ténor, saxophone baryton, 4 cors, 4 trompettes, 3 trombones, 2 tubas, 6 percussionnistes, timbales, harpe, piano (aussi célesta), 14 violons, 12 violons II, 10 altos, 8 violoncelles, 8 contrebasses
États-Unis, Los Angeles
Lucy Shelton : soprano, J. Felty : mezzo-soprano, Orchestre philharmonique de Los Angeles, direction : Esa-Pekka Salonen.
L'Icône paradoxale est un hommage à Piero della Francesca et à son oeuvre La Madonna del Parto. Le titre est emprunté à un essai d'Yves Bonnefoy. Cette oeuvre, fruit d'une grande admiration pour Piero della Francesca, est née d'une découverte émerveillée de La Madonna del Parto à Monterchi, ainsi que la lecture de l'analyse qu'en a fait Thomas Martone.
La mise en abîme des sons que je pratique depuis plusieurs années n'est pas sans rapport avec la perspective telle que la redécouvre la peinture renaissante et particulièrement Piero. Outre le nom de Piero della Francesca, le texte utilisé est celui, en italien, de son Perspectiva pingendi. La peinture du Quattrocento, et particulièrement celle de Piero della Francesca, a toujours exercé sur moi une telle fascination que j'ai accompli maints pélerinages entre Arezzo, Monterchi et Borgo San Sepolcro ; mais ce ne fut qu'en 1988, à la lecture d'une conférence de Thomas Martone sur La Madonna del Parto que me vint l'idée de composer un hommage à Piero della Francesca. Toutefois, cette partition ne fut pas commencée avant 199l. A la fois chrétienne et païenne, ardente et paisible, vierge et déesse matriarcale, archétype de la naissance et de l'interrogation, La Madonna del Parto se lit aussi à la façon des matriochkas, cet autre archétype matriarcal.
Au geste violent des anges écartant le rideau et à l'arrondi du dais damassé, répond le geste des doigts écartant la robe et l'arrondi de celle-ci. Un espace s'ouvre sur un espace qui s'entrouvre : l'infini est suggéré. Sans doute ma fascination n'est elle que projection, car ma musique depuis longtemps joue elle aussi sur les correspondances et la « mise en abîme » de temps radicalement différents (le temps des baleines, le temps des hommes, le temps des oiseaux...). Ici, l'orchestre est spatialisé en deux fois deux ensembles : le grand orchestre divisé en instruments graves et aigus, et un petit ensemble divisé en deux groupes symétriques qui enveloppent les voix humaines. Pour matériau vocal, j'ai utilisé les différentes signatures de Piero della Francesca en latin et en italien dont l'analyse sonagraphique m'a offert un très riche matériau de consonnes et quelques extraits de son Traité de perspective, De perspectiva pingendi. L'un des premiers du genre, ce traité, écrit en italien du XVe siècle au soir de la vie de Piero, recèle toute la modestie d'un cahier artisanal et pédagogique. « ...trace A puis B, prend un compas, mesure AB et pose deux fois la distance AB... » Voilà qui ne ressemble guère à un traité d'esthétique. Pas la moindre envolée poétique, pas le moindre manifeste, ou si peu ! Pourtant toute la peinture de la Renaissance est en gestation dans cette jubilante humilité. De ce Traité, j'ai aussi retenu quelques phrases qui m'ont semblé plus proches d'un propos musical : « chiari et uscuri secondo che i lumi le divariano... » Enfin, on comprendra que je n'aie pu résister à utiliser cela même du texte qui décrit la structure musicale à l'instant où on la perçoit.
Pour matériau temporel, j'ai utilisé les proportions qui sous-tendent la composition de la fresque :
3 - 5 - 8 - 12
Enfin, la forme de L'Icone paradoxale trace deux évolutions contraires analogues à deux diagonales dont l'intersection constituerait la partie médiane de la pièce. Quatre processus superposés occupent toute la durée de L'Icône en évoluant chacun dans un temps propre :
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