Deux ensembles sont placés à deux endroits opposés de la salle du concert. Dans la première partie de la pièce, chaque geste joué par le premier ensemble est rejoué inversé par le second dans un va et viens rapide entre les deux ensembles. Les sons font des allers-retours sur une ligne qui traverse la salle. Dans la seconde partie, deux points d'émission supplémentaires apparaissent grâce à l'électronique et forment une seconde ligne entre les haut-parleurs, opposés à la première entre les deux ensembles. Et les sons parcourent ensuite la surface entière de la salle.
Dans Alternance/topographie le son se déplace comme s'il voulait décrire la topographie du lieu. Il arpente le lieu, le mesure. Comme le promeneur parcourant les allées d'un jardin, la musique découvre peu à peu la surface de la salle. Et par cette mobilité du son, la musique nous révèle le lieu où nous sommes. Elle caractérise l'espace abstrait de la salle de concert, le rend présent, change l'espace en lieu. À l'opposé de l'idée d'un nomadisme servant de vente aux derniers produits technologiques, Alternance/topographie propose une esthétique de la sédentarisation. C'est une relecture de l'antiphonie qui nous fait éprouver la sensation du local, afin, comme l'énonce si bien le sociologue Marc Augé, de « reprendre conscience de nous-mêmes et des lieux où nous vivons ».
Jean-Luc Hervé.