Mémoire-spirale est une œuvre en deux parties : une pièce de concert pour un ensemble de dix-neuf musiciens suivit d'une installation sonore à l’extérieur de la salle de concert. Elle est fondée sur l'idée de la relation entre l'intérieur et l'extérieur.
La pièce instrumentale fonde son matériau sur cinq modèles de sons de notre environnement quotidien : frappe d'un marteau sur des tubes de métal (bruits de chantier), sonnette de vélo, cloche, allers et venues du bruit des pneus sur le pavé, et bruit d'un avion traversant lentement le ciel.
L'idée formelle de l'œuvre m'a été inspirée par l'architecture du dôme du Reichtag à Berlin construit par l'architecte Normann Foster. Le bâtiment est surplombé d'un dôme de verre transparent parcouru à l'intérieur par une double spirale d'où l'on peut contempler la ville. Les visiteurs qui empruntent cette spirale parcourent trois fois le tour du dôme à l'intérieur. À chaque tour, ils revoient ce qu'ils avaient déjà vu mais avec un point de vue plus élevé et dans un temps plus court. La forme de l'œuvre reprend cette idée de parcours qui se répète trois fois. Elle est constituée de trois parties de durées de plus en plus courtes qui passent toutes par les mêmes situations musicales, mais présentées à chaque fois d'une manière différente.
À la fin de la pièce, le processus d'accélération/répétition arrivé à son terme, la musique instrumentale passe dans la dimension électroacoustique, comme si le mouvement de spirale par son accélération permettait de s’échapper de la gravitation de l’intérieur de la salle de concert et de projeter la musique vers l’extérieur, en apesanteur.
L'installation qui suit fait passer les sonorités entendues durant le concert vers l'environnement. Elle « capture » les derniers sons entendus dans la salle et les projette dans l'espace environnant, comme si cet espace conservait leur mémoire. Les sons instrumentaux, « lachés dans la nature », retrouvent peu à peu leurs aspects originels et révèlent ainsi les modèles qui ont servit à la composition musicale. Elle fait en quelque sorte le parcours inverse de la composition.
Jean-Luc Hervé.