À la demande des Percussions de Strasbourg, je devais initialement écrire une œuvre pédagogique. Le projet s'est ensuite transformé en une suite de six pièces. Le solo de vibraphone ainsi que le duo de marimbas qui figurent dans ce cycle peuvent être joués séparément. Deux autres mouvements sont constitués par un duo de marimbas joué à deux, quatre instrumentistes et deux jeux de gongs thaïlandais (ou de cloches-plaques). Mais l'élément le plus motivant pour moi a été la découverte des sixxens (métalophone construit pour Iannis Xenakis) dont les caractéristiques sonores échappent aux normes habituellement rencontrées dans la lutherie occidentale. Les sons fortement inharmoniques de ces instruments m'ont suggéré des méthodes de composition tout à fait différentes, puisque la hauteur (donc l'harmonie, l'intervalle) n'est plus un élément d'identification.
C'est dans le domaine des polyrythmies ainsi que dans une adaptation de la vieille notion de « doublure » (ici faux unissons) que j'ai concentré mes efforts. L'idée qu'une source sonore différente des sources habituelles m'incite à imaginer des méthodes compositionnelles nouvelles rejoint, dans ces deux sextuors de sixxens, mes préoccupations dans le domaine des sons de synthèse.
Philippe Manoury, Les Cahiers de l'Ircam, coll. Compositeurs d'aujourd'hui n° 8, Paris, 1995.