Commande de la Juilliard School, écrite pour le Juilliard Ensemble, la Juilliard Serenade (Tempo Libero II) est une œuvre laissée délibérément ouverte par Bruno Maderna. Le compositeur écrit lui-même, à l’intention de ses interprètes : « Juilliard Serenade s’articule en une série de séquences et structures signalées par la succession de lettres alphabétique. Les sections (séquences et structures) sont de deux types : sous contrôle total – à exécuter rigoureusement selon ce que l’auteur a écrit – ; sous contrôle relatif – à exécuter avec une certaine liberté […] La succession des sections est laissée à l’interprétation du chef d’orchestre qui pourra en outre décider de les superposer, ou non. […] « La partition pourra être exécutée en même temps que Tempo libero I [N.D.L.R. : composition électronique réalisée en 1970 au Cabinet de Phonologie de la RAI de Milan afin d’être utilisée comme « musique d’ambiance » pour la première Biennale internationale de méthodologie globale de projet de Rimini] […] Le chef d’orchestre aura ainsi à sa disposition une quantité énorme de situations phoniques et hétérophoniques qu’il pourra organiser en divertissements, contrastes, intégrations, imitations, etc. En accord avec les techniciens, il pourra faire intervenir l’enregistrement avec les intensités et aux moments souhaités. »
Concernant Tempo libero I, Bruno Maderna confiera, au micro de la Radio de Sarre : « J’ai pensé que l’attitude d’un homme durant son temps libre devait être, au moins par principe, différente de celle de sa vie normale. On peut par exemple aller se promener dans les champs, observer et humer les fleurs et les arbres, écouter les oiseaux, et remarquer quantité de petits détails qu’on ne remarquerait pas habituellement, lorsque nous sommes occupés à nos travaux ou à quelque tâche domestique. Alors j’ai pensé à ce qui se passerait si quelqu’un prenait plaisir à écouter ces bruits, ces voix dans le lointain, le vent, et jusqu’aux souvenirs de la musique écoutée le soir d’avant, pour ensuite composer avec toutes ces expériences, et en faire un collage. Partant de quelques éléments contrastés, prévus comme psychologiquement opposés, j’ai donc exploré différentes possibilités d’interpolations. Par exemple, dans des bruits de voix, je n’ai retenu que les mots qui ont un timbre singulier, ou une signification littéraire particulière. Pendant le travail sur cette bobine, j’ajoutais sans cesse de nouveaux éléments, de nouveaux contrastes, sans jamais déranger l’équilibre harmonique de l’ensemble. »