Insatisfait de la guitare classique à six cordes, dont la construction diatonique trace des limites harmoniques qu'il ressent comme trop étroites, Maurice Ohana étudia avec le luthier madrilène Ramirez, en collaboration avec Narciso Yepes, la mise au point d'une guitare à dix cordes susceptible de libérer davantage d'harmoniques, et d'exécuter des clusters d'accords d'une grande richesse. Pour cet instrument il écrivit, à l'intention de Narciso Yepes, une série de pièces dans l'esprit des Graphiques et des Caprices, dont le titre, Si le jour paraît, est, une fois encore, emprunté à Goya.
La pièce centrale Vingt Avril (Planh) est une déploration funèbre, dénonciation de l'iniquité commise à l'égard d'un opposant au régime espagnol arrété et exécuté en 1962. Les autres pièces se groupent autour d'elle comme une constellation autour d'un soleil central. Leur composition fut nourrie de la fréquentation assidue des Etudes de Claude Debussy.
Notons une fois encore la référence à des formes vocales médiévales (ici des chants des troubadours : Enueg, Planh, Aube) ainsi qu'une thématique musicale qui s'inspire d'éléments de la nature. La technique instrumentale est issue du jeu des guitaristes flamencos.
Christine Prost, catalogue raisonné de l'œuvre de Maurice Ohana, Revue Musicale, Editions Richard-Masse.