Domaines existe en deux versions, pour clarinette seule ou pour clarinette et ensemble instrumental. La version avec ensemble instrumental est la version définitive, qui fut créée en 1968 à Bruxelles, et révisée en 1969.
Domaines représente dans l'œuvre de Boulez un exemple-type de la veine combinatoire et semi-ouverte appliquée aux instruments (comme par exemple ...explosante-fixe...).
Sur le plateau prennent place six groupes instrumentaux : Chacun de ces groupes possède sa propre partition, entièrement écrite, sous forme de six feuillets pour « l'aller » de l'œuvre (ou : « original »), et de six autres pour le « retour » (ou « miroir »). Domaines se compose en effet de deux parties de durée sensiblement égale.
Au centre du cercle formé par les six groupes, le soliste clarinettiste, ou « protagoniste », qui se déplace sur le plateau. À ses côtés, le chef. Le soliste est pareillement équipé de 6+6 feuillets sur lesquels sont écrites les séquences qu'il doit jouer.
À « l'aller » de l'œuvre, le clarinettiste soliste a l'initiative : il joue ses 6 feuillets « original » dans l'ordre qu'il veut. Il se place pour cela devant le groupe instrumental correspondant, et après chacune des séquences, le groupe lui « répond » en jouant sa propre partition.
À l'issue de « l'aller », c'est le chef d'orchestre qui prend l'initiative de décider selon quel ordre de séquences on accomplira le « retour », et au soliste à se plier à cette décision.
Comme on le voit, cette œuvre repose sur un dispositif qui prévoit un dialogue constant du soliste et d'un groupe d'instruments : dialogue qui peut s'effectuer dans les deux sens. Son intense raffinement sonore concourt largement à faire de Domaines une des œuvres les plus accessibles et les plus agréables de son auteur.
Dominique Jameux, programme du Festival d'automne à Paris, 1981, cycle Boulez.