Les sciences sociales ont volontiers invoqué le modèle de l’improvisation musicale pour penser l’interaction sociale en général, et la musicologie a longtemps misé sur la composition comme seule pratique créatrice pleinement légitime et séparée du monde quotidien. Cette opposition entre improvisation et composition, qui entraîne une série d’autres couples conceptuels (oralité et écriture, script et partition, etc.), est difficile à maintenir lorsqu’on s’intéresse de près aux pratiques musicales sur le terrain. Toute notation musicale est à la fois déterminée (elle s’appuie sur un vocabulaire de signes conventionnel et formalisé) et indéterminée (la notation ne peut jamais prescrire ou décrire un phénomène sonore donné dans sa spécificité physique). Cette question de l’indétermination se pose avec une acuité toute particulière dans le cas des projets compositionnels destinés à des interprètes « créatifs » (instrumentistes-explorateurs, improvisateurs, etc.), puisque l’indétermination ne se présente alors plus (seulement) comme un obstacle à surmonter mais tantôt comme une ressource compositionnelle propre, tantôt comme un espace de négociation permettant la cohabitation de logiques de création distinctes.
Ce séminaire vise à explorer ces enjeux de façon pragmatique à travers un ensemble d’études de cas, en collaboration avec des musiciens familiers tant de l’interprétation d’œuvres ouvertes que de la création de projets « hybrides » associant composition et improvisation. La plupart des séances joignent donc une partie d'exposé(s) théorique(s) et une partie « atelier » en dialogue avec les musicien.ne.s invité.e.s.