Le Quintette de cuivres fut écrit en septembre et octobre 1981, en réponse à une commande de Rolf Smedvig et de l'Empire Brass Quintet, avec le soutien de la Harvard Musical Association. C'est une tentative pour enrichir le répertoire d'une pièce de vraie musique de chambre, dans la mesure où les interprètes sont impliqués dans cette intimité musicale que l'on associe au quatuor à cordes ; le même type de responsabilité et la même intelligence musicale sont ici requises.
La pièce s'organise en trois mouvements.
Dans le premier se cache le spectre de la forme-sonate classique, dotée d'une introduction ; l'extension de celle-ci en fait toutefois presque un mouvement à part, et elle contient en germe les éléments harmoniques et mélodiques à venir. Le développement, comme dans la Symphonie de chambre de Schoenberg, se transforme en un scherzo, qui se dissout vers la fin dans des phrases fragmentées, dans une polyphonie plus éparse, jusqu'à devenir entièrement monodique avant la cadence finale récapitulative. La tonalité fondamentale d'ut, établie au départ, a basculé vers la mineur.
Le second mouvement est lent, et se réfère à l'innovation formelle de Haydn - la double variation -, bien que le second thème soit ici l'objet d'attaques et de dislocations provoquées par l'intrusion d'éléments appartenant au premier, se rapprochant plutôt du montage brusque d'images musicales fragmentées et conflictuelles chez Moussorgsky, voire même du montage concurrent des plans dans le cinéma d'Eisenstein. Le premier thème est identique à celui qui ouvre le premier mouvement, mais son harmonisation est plus riche et tend à s'éloigner de la région de la mineur. Celle du second, étayée par des la sur la totalité du registre, tend au contraire à y revenir. La première variation sur le thème d'ouverture est caractérisée par la lente pulsation des dyades confiées aux deux trompettes, tandis que la première variation du second thème est plus étendue, et sujette à de violentes interruptions par les trompettes tirant vers la mineur. La seconde variation sur le thème d'ouverture s'adjoint des mélismes de cor en filigrane et des fanfares aux trompettes. Les thèmes tendent alors à se fondre, accompagnés des douces pulsations des trompettes, l'athmosphère devenant toujours plus intense et intérieure. Alors que le mouvement semble arriver à une cadence en la majeur dans le registre aigu, cette tonalité est déstabilisée par une coda, préparant le terrain harmonique pour le finale.
Le dernier mouvement est très rapide. Après une exposition en forme de rondo, il retourne vers la mineur, avec des dyades répétées aux trompettes, dans le relâchement d'une longue figure ponctuée de silences, apportant un moment de repos. C'est un ré tenu par le cor solo, amené en un long crescendo du silence au triple forte, qui inaugure une séquence de trois courts développements - le second et le troisième étant signalés par un crescendo semblable sur un accord de deux ou trois notes. Cet accord de trois notes - ce «poteau indicateur» - fait lui-même l'objet d'une extension, et forme une lente et brève section indépendante, encore amplifiée lors du crescendo sur l'accord-signal de quatre notes faisant suite au troisième développement. Alors que l'on pourrait s'attendre à trouver ici le «grand apogée», c'est un sol tranquille du tuba, préparant le retour de la tonalité d'ut du premier mouvement, qui amorce un rappel en forme de choral des premières mesures de l'oeuvre ; celui-ci conduit à une séquence de fanfares extrêmement virtuoses marquant la cadence finale, et à une longue tenue - ut et ré - des deux trompettes dans l'aigu.
Peter Maxwell Davies.