Le titre In bianco e nero (En blanc et noir) exprime littéralement ce qui se passe sur scène, à savoir la transition transparente entre deux extrêmes du son musical : d’une part, le son instrumental, totalement incarné, caractérisé par la présence physique de l’interprète et du geste qui produit le son, et, d’autre part, le son électronique, totalement désincarné, et l’absence de la physicalité de l’interprète et de l’instrument.
Là où le son instrumental se produit dans la lumière, le son électronique se produit dans l’obscurité. L’une des idées de ce travail est l’exploration du contraire de la musique mixte : on essaie ici de faire ressortir les propriétés du son instrumental et du son électronique par différence, et par l’absence ou la présence d’un corps instrumental et d’un musicien qui produit le son avec le geste. La séparation nette est également exprimée visuellement avec le passage entre la lumière et l’obscurité, entre le clair et l’obscur – sans que l’on sache si le plus obscur est la corporéité instrumentale dans sa richesse inépuisable, ou l’électronique qui sépare le son de la relation de cause à effet avec un geste et un instrument physiquement présents sur scène. Pour cette raison, ce qui est proprement électronique ne cherche pas à se rattacher à une cause instrumentale ou à un lieu de rayonnement sonore, mais se situe à la plus grande distance possible de la nature organique de l’instrument, dans laquelle réside également la nature organique du lieu et du regard.
Francesca Verunelli, note de programme du concert ManiFeste du 25 juin 2022, dans la Grande Salle du Centre Pompidou.