L’œuvre originale a été écrite après la lecture des quatuors à cordes de Maderna (Quartetto per archi, 1955), dédié à Berio, et de Berio (Quartetto, 1956) dédié à Maderna. Outre ce jeu de miroirs, il y a la volonté de décliner avec une certaine ironie une manière post sérielle et de réduire l’espace du temps dans une forme brève qui alterne des plages mesurées et des événements aléatoires. Les matériaux sonores qui passent de l’un à l’autre des instruments entrainent une atmosphère frémissante. La superposition des lignes provoque une variabilité où les timbres sont continuellement changeants et font dialoguer des couleurs qui entraînent une écoute particulière. C’est le caractère étrangement indécis des parties aléatoires qui segmente l’ensemble. Les parties mesurées conduisent plutôt l’attitude des quatre instrumentistes qui se trouvent alors dans un rapport égalitaire. Cependant, lorsque l’aléatoire est superposé au mesuré, il y a un brouillage pour ne pas identifier l’une ou l’autre manière. Une brève incise fait entendre quelques notes de Verdi avec l’intention, par cette dramaturgie sous-jacente, de rompre le discours et provoquer un glissement de sens faisant ainsi dévier l’abstraction de l’œuvre vers une action instrumentale.
Philippe Fénelon.