Rivage est le nom générique d'un bord, de ce qui sépare deux univers. En ces termes réside la trace de la forme concerto dans cette pièce. Rivage désigne un lieu de promenade, ou bien un lieu où l'on accoste, éventuellement où l'on échoue.
La forme concertante se décline, dans les œuvres de répertoire, selon deux protocoles, d'une part l'opposition ou la fusion (entre piano et orchestre), d'autre part l'indépendance et la virtuosité. C'est sans doute plutôt ce versant qui est présent dans la pièce. On pourrait y ajouter la forme temporelle, qui a une histoire à la fois gelée par les conventions et variée dans ses propositions singulières, effleurées ici parfois en hommage à certains compositeurs instrumentistes, inventeurs de tournure pianistiques.
Les 4 concertos qui dans ma production précèdent Rivage (Flexus, Plexus, Nexus, Waves, dont les parties virtuoses sont incarnées respectivement par la flûte, le hautbois, la clarinette, et l'alto) font appel à des formations plus restreintes. Rivage traite donc un ensemble plus large, susceptible de nombreuses divisions et actions.
Le piano, s'il ne commence pas exactement comme leader, incarne pourtant les configurations de chaque nouvelle partie, au nombre de 4, subdivisées en 4, 3, 3, 2 sections. Cette division, réglée par des tempi récurrents, également au nombre de 4 (hommage lointain aux mouvements traditionnellement contrastés) organise un épuisement partiellement programmé d'un matériau qui souhaite adopter une enveloppe purement gestuelle, avant de conclure, dans ce cas d'accoster au bord de sa fin.