En 1918, Webern s'installe à Mödling (banlieue de Vienne), à cinq minutes de chez Schoenberg. L'une de ses premières fonctions rétribuées va être la direction des études de la « Société pour les exécutions musicales privées », dirigée par Schoenberg et dont le but était de faire connaître la musique nouvelle.
Webern occupe cette fonction de 1918 à 1922. A cette date il écrit à Zemlinsky (beau-frère et unique professeur de Schoenberg) en lui indiquant qu'il s'apprête à transcrire la Symphonie de chambre, opus 9 pour l'effectif instrumental du Pierrot Lunaire (probablement en vue d'une exécution réduite pour la « société » de Schoenberg). On connaît par ailleurs l'admiration que portait Webern à cette œuvre... À une époque où Mahler écrit ses symphonies pour d'immenses orchestres, qu'il traite néanmoins en groupe de solistes, Schoenberg réduit l'effectif à quinze solistes, modifiant ainsi le volume respectif de chaque groupe instrumental.
Ici l'effectif original de quinze solistes se voit encore réduit à un piano, une flûte (ou deuxième violon), une clarinette (ou alto), un violon et un violoncelle. Cette nouvelle version est donc centrée autour du piano, qui de par son écriture polyphonique, condense plusieurs instruments, tels les cors, les bassons ou encore les cordes. Si la tonalité indique mi majeur, le thème composé d'un empilement d'intervalles de quartes, transcrit ici au violoncelle, dément immédiatement cette proposition. Schoenberg démantèle la tonalité par cet intervalle de quarte générateur du thème, mais aussi de l'harmonie et c'est sans doute un des aspects les plus fascinants de cette œuvre tellement située historiquement. Schoenberg dissout ainsi les éléments essentiels du langage musical, tout en essayant de construire une forme de continuité, les quatre mouvements de la symphonie étant concentrés en un seul et réalisés dans une forme sonate élargie (forme traditionnelle du premier mouvement de la symphonie classique).
La Symphonie de chambre, opus 9 fut créée à Vienne en 1907...ce fut un énorme scandale... égal à celui du Sacre du Printemps de Stravinsky, quelques années plus tard. Mahler, un des plus ardents défenseurs de Schoenberg, qui était présent à ce concert, eut beaucoup de mal à obtenir le silence...