Le Récit de l'An zéro, paru au Mercure de France en décembre 1956, est celui de la Nativité transposée, contée et représentée devant une communauté noire. Georges Schéhadé en a fait une sorte d'allégorie, montrant l'exaltation mystique de l'assistance à la lecture de l'évangile et l'assemblée revivant elle-même le drame de la Sainte Famille à Nazareth. Le projet d'une nouvelle collaboration avait été envisagé dès 1954 entre Schéhadé et Ohana, à la suite de la Comédie des Proverbes. Mais la poésie de ce texte, qui n'échappe pas à un certain angélisme, semble avoir gêné le compositeur qui, à travers les personnages du théâtre, cherche essentiellement des archétypes. Il ne pouvait les trouver dans ce mystère dont la naïveté ne va pas sans quelque artifice. Il réutilisera cependant certaines idées expérimentales de cette partition pour son théâtre musical, particulièrement en ce qui concerne le matériau sonore (importance essentielle de la percussion, intégration du piano et de la cithare en tiers de ton à l'orchestre, emploi d'un nombre restreint d'instruments à vent solistes, participation des chœurs en parlé-chanté-rythmé).
Christine Prost, catalogue raisonné de l'œuvre de Maurice Ohana, Revue Musicale, Editions Richard-Masse