Pourquoi un rondo ?
Il peut paraître évident de penser, d'un côté, que la forme du rondo a été tellement usée, depuis l'époque classico-romantique, qu'il n'y a plus rien à en tirer, surtout lorsqu'on insiste sur la forme elle-même. D'un autre côté, le concept de « rondo » est le point de confluence de nombreux éléments sans aucun rapport avec la tradition qui va de Haydn à Mahler, et qui apportent de nouvelles significations à l'idée de retour, d'alternance et de cercle.
L'attention se fixe ici, comme dans toute musique, sur l'effet modificateur du temps, qui joue sur toute répétition : rien ne revient tel qu'il était apparu à l'origine. Le temps est le moteur dialectique du rondo, ce qui fait apparaître le même (et le rondo en soi), lorsqu'il revient, comme autre et comme nouveau.
Les rétrospectives et retours au passé peuvent, très souvent, donner lieu à un progrès. Ce que nous considérons comme l'actualité de l'histoire est essentiellement formé par notre propre regard, car l'histoire n'est pas « là », simplement présente, nous nous l'approprions et nous l'inventons. Si bien que ce qui était pensé comme une « Renaissance » devient justement, souvent, la naissance de quelque chose de nouveau — un quiproquo créateur. Rondo prend donc pour thème, de diverses manières, comme le poème Autour de l'amour de René Char et André Breton, la force de renouveau que contient le principe du refrain :
Je t'enfouirai dans le sable
Pour que la marée te délivre
La liberté pour l'ombre
Je te ferai sécher au soleil
De tes cheveux où le phénix tombe dans une trappe
La liberté pour la proie
Johannes Schöllhorn, programme du concert de création, le 27 avril 1997, Cité de la musique