Pour Mei-Fang Lin, RemembeЯ, c’est d’abord revisiter R, une commande de l’Ircam créée en 2023 à Taipei, pour deux danseurs (Lin Youru et Tian Xiaoci) et électronique (sons fixés et traitements en temps réel), accompagnée d’une création visuelle alliant lumière et vidéo. Composée dans le sillage de la pandémie qui avait plongé le monde dans une torpeur ouatée, bientôt suivie par l’exaltation des Jeux Olympiques et d’une Coupe du monde de football, R explorait les sensations physiques d’un sportif reprenant son entraînement – du bain d’endorphines, agissant à la manière d’un fix de drogue, à la douleur des courbatures, signe de croissance des muscles.
R, c’était le running, c’était repartir, c’était respirer, à nouveau, en laissant les confinements bien loin derrière soi. C’était reparcourir un paysage à la fois nouveau et familier. C’était reprendre l’exercice, encore et encore, jusqu’à dépasser ses limites, jusqu’à ce que l’entrainement même transcende l’athlète.
Ce nouveau départ se déclinait en deux sections. « Discipline », d’abord, évoquait la rigueur de l’entraînement, qui exige de répéter sans cesse les mêmes gestes – discipline cruciale pour se relancer et se surpasser. Et puis « Improvisation », qui n’est autre que le véritable spectacle après tant de préparation – tant il est vrai qu’on s’embarque sur le chemin de la vie sans rien en connaitre, mais voulant toujours plus le maîtriser : on a beau s’entraîner et anticiper, que se passera-t-il lorsque les préparatifs devront enfin se concrétiser en action ?
La discipline de l’exercice comme la nécessaire flexibilité de l’action ne concernent pas uniquement les sportifs, mais tous les performers, comédiens, musiciens ou danseurs. Tous doivent passer par de longues phases de répétitions, laborieuses et souvent fastidieuses, qui se subliment enfin au cours de la représentation elle-même – qu’il s’agisse d’un événement sportif, d’un concert ou d’un spectacle. Tant d’énergie dépensée, quand la performance ne constitue somme toute qu’une infime partie du temps de travail…
Rappelant à la fois les souvenirs de l’entraînement que l’on porte dans sa chair, et la mémoire si essentielle du geste, cette nouvelle version de R entremêle les deux phases, discipline et improvisation, les inversant parfois. D’où son titre : RemembeЯ.
This entry is encyclopaedic in nature and does not reflect the collections of the Ircam media library. Please refer to the "scores" entries.
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