Le titre Les Lettres enlacées réfère à une écriture basée à la fois sur le chevauchement, la superposition, le croisement, et le retour à une répartition quasi parallèle de deux voix mélodiques. La pièce doit donc être pensée comme une véritable polyphonie. De ce mouvement naît en effet une expressivité et des impulsions particulières dont on peut trouver l'origine notamment dans l'enchevêtrement des lignes du piano romantique, en particulier chez Schumann et Brahms. Il s'agit d'une mélodie en canon écrite en doubles cordes, une voix « poursuivant » l'autre, par une sorte de dédoublement en micro-intervalles. L'interprète trouvera cette expressivité en respectant scrupuleusement l'écriture, fondée néanmoins sur une très grande souplesse métrique et un legato. Il veillera à structurer l'interprétation de la pièce autour des progressions ascensionnelles des sections A, B, C et H. Les figures de la section H peuvent être considérées comme de « faux glisesendi » ou encore comme des effets globaux et paradoxaux obtenus par cette polyphonie en lettres croisées. Dans la section G, l'interprète veillera également à bien mettre en évidence l'effet de cloche produit par les pizzicati des cordes à vide et la progression en crescendo de la quatrième corde (ut) à vide.