jardin_berceuse_intérieur est ma première tentative d'appropriation de l'espace acousmatique.
Le titre se réfère d'abord aux trois sections qui composent successivement la pièce ; mais, dans une certaine mesure, chaque terme est également le reflet d'une caractéristique du mouvement pris dans son ensemble. En effet, si ces trois moments sont successifs, il ne sont ni étanches ni trop fortement articulés. Ils induisent un mouvement poétique et sonore qui part d'une texture évocatrice, s'intériorise, et arrive à un contrepoint abstrait ; chaque instant peut renvoyer au mot-valise du titre.
Le jardin que l'on découvre petit à petit est une invitation à la rêverie, à l'écoute, à se perdre. Cette évocation sonore stylisée se « musicalise » en s'immobilisant dans un atmosphère de berceuse qui conduit au sommeil, passerelle vers un autre univers, intérieur, plus abstrait dans sa construction – un contrepoint à deux voix – mais plus concret dans son traitement sonore. Mais on peut s'apercevoir que ce type de phrasé était déjà sous-jacent dès le début du mouvement.
La recherche d'un état particulier d'écoute et d'univers sonore lié à la diffusion sur haut-parleurs m'a conduit à rechercher un phrasé fondé sur des types différents de répétitions, de manière à structurer musicalement le discours sonore. Ces répétitions apparaissent dans le jardin, composent les balancements à différentes échelles de la berceuse, ou régissent le phrasé des objets sonores d'intérieur.
Cette diffusion abstraite liée à l'absence d'instrumentiste, à un certain mystère physique de la source sonore, en même temps qu'à la nature des sons électro-acoustique (trop mystérieux pour être catalogués et associés à une représentation, ou trop évidents pour être jugés « musicaux ») m'a déterminé à partir d'un univers associé à une représentation poétique (le jardin) et à dériver progressivement vers une composition de musique « pure », n'évoquant qu'elle-même.
De même, mais inversement, si les sons évocateurs sont liés à un univers poétique, leur genèse technique n'est pas identifiable, alors que le discours purement musical de la fin est composé de prises de son à l’état brut, à peine orchestrées. Un peu comme si l'espace autour du micro d'origine se rétrécissait : parti d'un plein air imaginaire, on se retrouve à quelques millimètres du micro.
Ces échantillons à la base d'intérieur, une corde de cymbalum pincée ou grattée et un bloc de polystyrène raclé sur un tom alto, sont également à l'origine de tous les sons entendus dans jardin et berceuse, mais qui étaient alors transformés (principalement par les GRMTools).
Nicolas Mondon.