<p>Cette pièce est destinée à prendre part à un projet d'opéra sur le double thème du corps et du travail — y sont convoquées deux narrations — l'une mythologique (le texte d'Ovide, extrait des <em>Métamorphoses</em>, dans lequel Pygmalion faconne puis s'éprend de Galathée), l'autre historique (le récit par Simone Weil de sa propre expérience du travail à l'usine).</p><p>Dans un cas comme dans l'autre, c'est de lacune dont il s'agit : l'impossibilité pour Galathée de comprendre le monde des sensations comme "allant de soi" (il s'agit chez elle d'une notion extérieure, d'une idée dépourvue d'expérience préalable). L'impossibilité, lors du travail à l'usine, d'isoler son esprit des tâches inhumaines dont son propre corps est acteur et victime (il n'y a pas de place pour laisser vagabonder ses idées).</p><p>De même, l'écoute de cette partie centrale de l'opéra, momentanément dépourvue d'appareil orchestral et choral, ne se réalise que négativement : la disposition spatiale des voix et des deux groupes d'instruments ne permet pas aux auditeurs une écoute globale, frontale ou englobante, mais au contraire schizée : spatialisation et dramaturgie participent indissolublement à la double expérience du corps de l'autre décrit de l'extérieur (Galathée), et de l'expérience intime de son propre corps (Simone Weil).</p><p><em>Brice Pauset.</em><br /></p>