Contes Cruels est le titre d'un recueil de nouvelles de Villiers de l'Isle-Adam (1838-1889).
La pièce est écrite pour deux guitares électriques et petit orchestre (bois par deux). La deuxième guitare est accordée un un quart de ton plus haut. Les deux guitares sont transformées électroniquement, en particulier par des modulateurs en anneau, échos, distorsions. Les guitares jouent parfois en soliste, ou parfois proposent des modèles acoustiques qui sont imités ou commentés par l'orchestre. La forme de la pièce ressemble à une suite de « contes » qui sont insérés les uns dans les autres, à la manière des Contes des mille et une nuits (ou d'une fonction écrite en LISP...). Cependant, il n'y a ici aucune intention programmatique, et ces contes musicaux ne narrent aucune histoire précise ! À deux exceptions près :
- au début de la pièce, et à un certain nombre d'autres moments, les guitares jouent un motif basé sur les mots « Il était une fois » – ce motif est caractérisé par le son de modulation en anneau – un son très particulier, qui est souvent repris en écho par l'orchestre. Il a le rôle d'une sorte de signal, ou de jalon, qui indique un changement de « conte », au sein de cette narration fictive.
- l'un des « contes cruels » de Villiers de l'Isle-Adam a pour titre Le secret de l'ancienne musique. C'est l'histoire bizarre d'un joueur de chapeau chinois (un instrument de percussion qui consiste en un grand nombre de clochettes fixées autour d'un manche central, et qu'il est très difficile d'empêcher de sonner). Le joueur de chapeau chinois est engagé pour jouer une partie soliste dans une création d'un compositeur d'avant-garde (du XIXème siècle !) – sa partie consiste en crescendos de silence... À la fin du concert, l'instrumentiste proteste publiquement contre la nouveauté de la musique et devient si véhément qu'il tombe sur la grosse caisse, crève la membrane et disparait à l'intérieur.
Un auditeur attentif percevra dans la pièce quelques allusions humoristiques à ce conte...
Tristan Murail, éditions Lemoine.