D'un seul tenant, le Concerto pour piano et orchestre met particulièrement en valeur l'instrument soliste dont elle explore en profondeur les ressources sonores et rythmiques. Deux climats se font jour à mesure du déroulement de l'œuvre, climats dont la synthèse est familière à ceux qui ont suivi l'évolution du compositeur. D'une part, ici, la Saëta : sorte d'incantation adressée aux images saintes lors des processions de la semaine pascale dans le Sud de l'Espagne, et d'autre part le piano des maîtres du jazz classique (Fats Waller et Count Basie en particulier). Brigitte Massin parle avec raison à propos de ce concerto, de « piano éclaté » les registres et les contrepoints ayant souvent un caractère centrifuge dans une polyrythmie et des tempi divergents aux deux mains. Une liberté presque complète est laissée à la partie soliste par rapport au Cantus Firmus de l'orchestre, écrit, lui, en métrique classique. « Une œuvre profondément ibérique, tout autant que française » écrit à son propos Harry Halbreich, « où le souvenir transcendé et sublimé de Debussy n'est jamais loin ».
Christine Prost, catalogue raisonné de l'œuvre de Maurice Ohana, Revue Musicale, Editions Richard-Masse.