Coda est un mot que les musiciens connaissent bien. Il indique l'idée d'une conclusion prolongeant de manière libre et quasi improvisée tout ou une partie du développement musical. Bien qu'en musique cette définition puisse être considérée comme limitée, les sémiologues élargissent, observent, étudient ce mot par cette question : comment terminer, achever en peu d'éléments un discours qui rassemble toutes les caractéristiques induites par l'exposé entier (par exemple, les dernières lignes de Madame Bovary de Flaubert).
Pascal Dusapin.
Composé du 13 février au 29 mai 1992, Coda est une partition où chaque bloc, chaque partie, chaque séquence acquiert la responsabilité d'introduire sa propre fin et la fin même de l'œuvre, d'introduire au chaos du néant, « mais en refusant toutes terminaisons ou procédés conclusifs aux tensions mises en place ». Dans Hop' déjà, une citation de la correspondance de Gustave Flaubert, que Coda éclaire singulièrement : « La bêtise consiste à vouloir conclure… »
Les répétitions de la polyphonie primitive, « minimaliste », des premières mesures, avec ses quatre notes qui se chevauchent, qui s'encerclent, sont ainsi déployées et peuvent apparaître à la fois comme la pétrification, la fossilisation d'un paramètre et comme l'ultime tentative d'ébranler un simple matériau en devenir, comme l'achèvement inaugural de son cours et comme les prémisses d'« incessantes variations mélodiques et rythmiques par accroissement de leurs territoires harmoniques ».
Loin des processus, le développement continu d'une simplicité initiale trouve dans les contrastes volontiers exagérés, dans la surprise d'une coupure, dans la vigueur d'un tutti déchiré et dans l'ampleur d'une mélodie à caractère modal, l'utopie d'une verticalité aux rythmes complexes et perforés, « la métaphore de la toute violente banquise » du Quatuor.
Pascal Dusapin et Laurent Feneyrou, notice du concert Ensemble intercontemporain/Groupe Vocal de France, 10 janvier 1994.